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  • DUEL AU SOLEIL DES COTEAUX (4/4)

    FEUILLETON AUTOMOILE

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     Suite des 3 premier épisodes en ligne ICI

    1 - http://bit.ly/1trq9Df

    2 - http://bit.ly/1vJ6dTB

    3 - http://bit.ly/1vjuSMr

    Quelques fictions en plus d’infos sur la course auto, tel est le programme du blog CIRCUIT MORTEL Bien sûr, les histoires qui se déroulent dans l’univers de David Sarel, le héros récurrent de mes romans, sont privilégiées. Éric Trélor, parrain de David Sarel, raconte ici au journaliste Sébastien Ménier une course de côte qui l’a particulièrement marqué au début de sa carrière de gentleman driver.

    Sébastien Ménier : La tension monte avant le départ, je présume.
    Éric Trélor : Oui, forcément. Les courses de côte étaient courtes. Souvent moins de 2 kilomètres. Cela veut dire qu’une erreur ne se rattrape pas. Il faut réussir le parcours absolument parfait, à limite de ce qui est possible partout. Le stress pour moi, c’était toujours quand il restait six ou sept voitures devant. Là, je mettais ma cagoule, mes gants, mon casque, et je rentrais dans la phase finale de la concentration. Après quand il ne reste plus que deux ou trois voitures à partir avant toi, tout va bien. Tu es déjà entré dans la course. Puis on te fait signe d’avancer sur la ligne de départ. Le starter t’annonce les 30 secondes en croisant les index des deux mains, puis les dix avec les dix doigts devant le pare-brise. Tu as enclenché la première. Le starter effectue le décompte des cinq dernières secondes en repliant un à un les doigts de la main devant ton pare-brise. Tu fais monter le moteur dans les tours au rythme du décompte. Ça y est, il te libère. Tu es en course.

    Sébastien Ménier : Ton cœur bat plus vite.
    Éric Trélor : Tu ne t’en rends même pas compte. Tu montes les vitesses et tu soignes les trajectoires. A Pouillé, les deux premiers virages passaient à fond, mais il y a tout de même quelques millièmes à gagner en passant propre. Puis c’est le freinage avant le gauche. Je freine tard, je rentre une vitesse, je ré-accélère et je plonge dans l’accotement à gauche ce qui secoue un peu l’Alfa. Je sors en dérive. Je sens que l’arrière s’appuie sur les bottes de paille à l’extérieur. Je me régale au volant. J’ai l’impression qu’aujourd’hui, personne ne peut aller plus vite que moi avec une Alfa. Le temps passe vite. J’arrive déjà au haut du circuit. J’ai franchi la ligne d’arrivée. Je roule jusqu’au parc d’arrivée, un simple champ. Je me gare derrière l’Alfa blanche de Jacques et je cours au panneau d’affichage. Mon temps n’est pas encore tombé. Luc m’annonce qu’il est en tête des Rallye 2. Il ajoute que Jacques a raté son freinage avant le gauche de la descente. Il a bloqué les roues au point de dégager un nuage de fumée (de la gomme brûlée) et frôlé la grosse sortie. Je vois que mon principal rival dans la catégorie des 2 litres groupe 1 a l’air déçu. Pour l’instant, Pierre Sapeur sur l’Escort 2000 RS devance Christine Verrec et sa Triumph de 3 dixièmes et Jacques de plus d’une seconde. Pierre et Christine attendent mon temps avec autant d’angoisse que moi. Il tombe enfin. Je colle six dixièmes à Pierre. Le pilote de l’Escort 2000 RS me félicite, non sans une petite pointe d’amertume. « Là, je ne suis plus, marmonne-t-il. Ça devient déraisonnable, complètement dingue. Je cours pour m’amuser moi. Je ne veux pas y laisser ma peau. » Je le laisse dire. Je crois effectivement que Pierre n’ira pas au-delà d’un certain degré de risque, mais je sais que Jacques, comme moi, est capable d’aller chercher les derniers centièmes, la limite, très, très loin. Sans prétention, ce n’est pas pour rien que nous sommes les hommes à battre dans la catégorie alors que nous n’avons probablement plus les meilleures voitures. Je n’ai pas encore gagné. Il reste une montée de course. Tout peut arriver. D’autant que la rage qu’expriment les yeux de Christine annonce qu’elle pourrait bien trouver la force mentale qui lui permettra de martyriser sa Triumph Dolomite et de venir nous disputer la victoire. Sa voiture développe tout de même 50 chevaux de plus que les nôtres. Un sacré avantage dont elle n’a toujours pas trouvé le mode d’emploi en côte.

    Sébastien Ménier : Tu nous a confié tout à l’heure qu’elle réalisait des performances en circuit. Pourquoi n’y parvenait-elle pas dans une autre discipline ?
    Éric Trélor La Triumph Dolomite exigeait un pilotage particulier. C’était une voiture brutale. Il fallait la balancer sans hésitation dans les virages, la faire glisser, faire lever les roues. Sur les routes étroites qu’empruntaient les parcours de courses de côtes, ce n’était pas très sécurisant.

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    Sébastien Ménier : Que se passe-t-il entre les deux montées ?
    Éric Trélor : Une fois les trois litres groupe 1 passées, 5 Commodore dont 4 réaliseront un moins bon temps que moi, nous redescendons en empruntant le tracé du circuit à l’envers.. Mikaël, Stéphane et sa compagne Marianne s’étaient placés dans l’enfilade au début de la montée. Je ralentis et nous échangeons des signes. Je vois qu’ils sont très enthousiastes. Je gare la voiture en bas du circuit. Michel et André sont sur la ligne de départ. Ils contrôleront que tout va bien sur l’Alfa tout à l’heure. Luc Crillon dispose d’une moto de cross 125 que son mécano a embarquée dans son camion d’assistance. Il me propose de m’amener à l’enfilade où sont nos amis. Nous disposons d’une bonne heure et demie avant de repartir. J’accepte avec joie. Une fois rendu sur place, je rejoins Mikaël, Stéphane et Marianne. Les voitures du groupe 2 sont en train d’en découdre. Mikaël me commente la course de mes principaux adversaires. Il ne voit pas qui pourrait me battre aujourd’hui. Les concurrents du groupe 3 vont bientôt s’élancer. Parmi eux, Ronnie qui vise deux objectifs. D’une part, battre les autres coupés Simca 1200 S et Fiat X 1/9 qui s’affrontent dans sa catégorie. Et d’autre part, devancer la meilleure Rallye 2, en l’occurrence celle de Luc. Ronnie fait un complexe vis à vis de Luc qu’il croit meilleur pilote que lui. Ronnie attaque très fort, il pilote même comme une brute. C’est un bon. Mais il redoute qu’il lui manque la petite étincelle que possède Luc et qui permet de jouer la gagne dans les catégories les plus relevées. En outre, comme lui, Luc est un gars costaud, qui n’a peur de rien. Aussi brun que Ronnie est blond, Luc domine son copain dans tous les exercices. Pas facilement mais que ce soit au tennis, à vélo, au bras de fer, à la lutte, en natation, Luc finit généralement par l'emporter… Ronnie accepte tous les défis de Luc et les perd presque tous, avec souvent une bouffe dans une pizzéria à la clef. Alors Ronnie voudrait avoir sa revanche, au moins une fois. J’aimerais d’ailleurs bien qu’il y parvienne. J’apprécie beaucoup Ronnie. Je le connais depuis l’école communale. Nous étions voisins. Contrairement à Luc qui se prépare à devenir prof de sport, Ronnie a quitté l’école de bonne heure. Il est devenu carrossier et travaille dans l’entreprise qu’avait montée mon grand-père Victor. C’est d’ailleurs mon grand-père qui l’a fait embaucher par son successeur comme apprenti l’année de ses 16 ans. Mon grand-père est mort trois ans plus tard. Ronnie est resté dans l’entreprise. Je sais qu’il rêve de la racheter un jour au patron actuel, un ancien ouvrier de la boite qui est à moins de dix ans de la retraite. Je souhaite qu’il réussisse ce défi et je l’encourage dans l’objectif professionnel qu’il s’est fixé car je sens que quelque part, l’idée plairait à mon grand-père. Mais nous n’en sommes pas là. La mission de Ronnie aujourd’hui, il l’a déjà acceptée, c’est de remporter au moins la catégorie des voitures du groupe 3 de moins de 1300 cm3. Il en est capable. Quoique d’un bon niveau, la lutte dans cette catégorie est moins disputée que dans les diverses classes du groupe 1 qui est un groupe de fous furieux commente le speaker chaque week-end de course. Battre les Rallye 2 où les meilleurs jouent leurs caisses à quitte ou double à chaque virage, ce sera beaucoup plus dur. D’ailleurs, dans toutes les courses de l’Hexagone, les coupés Simca 1200 S sont derrière les meilleures Rallye 2. Mais une fois de plus, Ronnie a levé le défi de Luc avec un dîner dans une pizzéria pour enjeu.

    Sébastien Ménier : Pari gagné ou non ?
    Éric Trélor : Objectivement, quand j’ai vu Ronnie freiner avant le gauche et placer sa voiture en appui, je me suis dit, aujourd’hui, il va y arriver. « Ben ça alors, il en a ! » a hurlé Luc. La 1200 S est partie en large dérive des quatre roues. Elle était superbe, gris clair métallisé avec des liserés orange. Mais Ronnie avait remis les chevaux un millième de seconde trop tôt. L’arrière de la 1200 S a continué à déraper sur l’herbe en faisant gicler les bottes de paille. Le pilote n’a pas levé le pied, espérant se sortir de sa situation en force, en restant soudé. Hélas, la roue arrière droite a fini par glisser dans le fossé, freinant brutalement la voiture. Du coup l’avant est venu basculer à son tour dans le fossé et le beau coupé est parti dans le champ en dévers en tonneaux par l’avant dans vacarme de tôles fracassées qui ressemblait à une série d’explosions. Trois figures plus tard, la 1200 S de Ronnie s’immobiliser sur le toit. L’attente a duré huit ou dix secondes. Compte tenu de la violence des chocs, nous étions très inquiets. Au premier tonneau, Marianne a laissé échappé un petit cri. La compagne de Stéphane connaissait bien Ronnie. Nous formions un vrai groupe d’amis. Non seulement nous nous voyions sur les circuits, mais nous nous fréquentions en dehors. « C’est de ma faute, a dit Luc d’une voix blanche. Je n’aurais pas dû le provoquer. Dès qu’il s’agit d’un pari, il ne marche pas, il court. » Luc et Ronnie étaient des têtes brûlées. Personne ne les changerait. Luc proposa de prendre la moto pour aller voir. J’allais le suivre. A cet instant, nous vîmes Ronnie sortir de sa voiture par l’emplacement du pare-brise qui avait quitté le navire, ou plutôt la caisse, au premier tonneau. Il enleva tranquillement son casque et leva la main, pouce en l’air, afin d’annoncer que tout allait bien. Nous étions soulagés.

    Sébastien Ménier : Ronnie a-t-il recommencé à courir rapidement ?
    Éric Trélor : Naturellement. Le week-end suivant, il faisait les Cent tours de Magny-Cours avec Luc sur la Rallye 2 (c’était une épreuve où les pilotes se relayaient). Quinze jours plus tard, il était au départ de la Course de côte de Landivisiau. Ronnie possédait deux caisses de réserve, déjà décorées, avec les faisceaux électriques installés. Il a remonté très vite sa voiture avec des copains qui bossaient à l’atelier de carrosserie. Ronnie était un peu comme Gilles Villeneuve une fois sur la piste. Je ne crois pas que son rythme cardiaque se soit beaucoup accéléré pendant l’accident. Nous sommes redescendus au départ pour le réconforter. Il ne semblait pas du tout affecté. Dès qu’il nous a vus, il a adressé une boutade à Luc en rigolant. « T’as encore gagné, enfoiré. Ben j’ai plus qu’à t’inviter au Don Camillo demain soir. » C’était tout Ronnie.

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    Sébastien Ménier : Et la fin du week-end pour toi ?
    Éric Trélor : Impeccable. J’ai amélioré d’un dixième dans la seconde montée. J’avais le sentiment d’avoir piloté exactement de la même manière, au millimètre près, mais je crois que le revêtement était un tout petit peu moins chaud et que le rendement des pneus s’en trouvait légèrement amélioré. Jacques s’est intercalé entre moi et Pierre, mais il restait à une demi-seconde derrière moi. Pierre était démotivé, du coup il a trop assuré et il a fait moins bien qu’à sa première montée. Quant à Christine Verrec, elle a piloté le couteau entre les dents, au point de partir en tête à queue dans l’enfilade. Elle a filé dès la fin de la course sans même venir à la remise des prix. Les Alfa 2000 GTV avaient encore battu l’Escort 2000 RS et la Triumph Dolomite. Luc a conservé la tête des Rallye 2. Lui-aussi devenait un sacré pilote.

    FIN

    NOTE MODIFIEE LE 14 AOÛT 2015

     

    QUELQUES LIENS A SUIVRE

     

    Ronnie pourrait être un personnage de BD http://bit.ly/1fhtTYz

     

    Quelques années plus tard, Éric et Luc au cœur d’un polar automobile lors d’un rallye en Auvergne http://bit.ly/1gDZwV5

     

    Quelques sorties de route en course de côte… dont une des miennes… http://bit.ly/QIejJ9

     

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    Thierry Le Bras  

  • DUEL AU SOLEIL DES COTEAUX (3)

    FEUILLETON AUTOMOBILE

    Courses de côtes, Alfa Romeo, 2000 GTV, Talbot Rallye 2,  groupe 1, Simca 1200 S, groupe 3, Pouillé les Coteaux, camping, feuilleton, fiction

    Suite des 2 premiers épisodes :

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    2 - http://bit.ly/1vJ6dTB 
     
    Quelques fictions en plus d’infos sur la course auto, tel est le programme du blog CIRCUIT MORTEL Bien sûr, les histoires qui se déroulent dans l’univers de David Sarel, le héros récurrent de mes romans, sont privilégiées. Éric Trélor, parrain de David Sarel, raconte ici au journaliste Sébastien Ménier une course de côte qui l’a particulièrement marqué au début de sa carrière de gentleman driver.

    Sébastien Ménier : la vraie course était lancée !
    Éric Trélor Les montées du samedi ne comptaient pas pour le classement. Mais il était tout de même important de prendre ses repères pour la course. En plus, psychologiquement,, celui qui marche fort le samedi montre ce qu’il vaut à ses concurrents. Je suis parti parmi les derniers, à 17 heures 45, un quart d’heure avant la fermeture de la piste. Jacques Dumoulin et Christine Verrec avaient déjà effectué leurs deux montées d’essais. Tout comme Pierre Sapeur, un pilote de Ford Escort RS 2000 dont je me méfiais. L’Alfa Roméo 2000 GTV arrivait au bout de sa carrière sportive. D’autres modèles comme l’Escort 2000 RS, l’Opel Kadett GTE et la Triumph Dolomite bénéficiaient de nouvelles homologations qui les rendaient de plus en plus compétitives. Or Alfa ne développait plus le coupé 2000. Je m’attendais donc à ce qu’un jour, la Ford de Pierre Sapeur reçoive de nouvelles pièces qui lui fassent gagner d’un coup une seconde au kilomètre. J’espérais simplement que ce serait le plus tard possible, peut-être seulement en 1978 où je ferais pour ma part débuter le futur Coupé Vivia 16 S en groupe 3. A ce moment-là, la montée des autres modèles en groupe 1 me concernerait moins. Je savais déjà toutefois que Jacques Dumoulin se convertirait à l’Escort en 1978. Il ne chercherait même pas à vendre son Alfa à un autre pilote. Un de ses copains la lui reprendrait en octobre pour rouler avec sur la route.

    Sébastien Ménier : A Pouillé-les-Coteaux, l’Alfa resta-t-elle compétitive ?
    Éric Trélor : Elle n’avait pas dit son dernier mot, et moi non plus. J’ai effectué la deuxième montée d’essais en attaquant raisonnablement, juste pour valider les repères que j’avais pris en reconnaissance. J’ai réalisé le troisième temps des deux litres. Christine Verrec pointait pour une fois en tête avec sa Triumph, devant Jacques et moi. J’étais à trois dixièmes de Christine, un de Jacques et deux dixièmes devant Pierre. Bien sûr, Jacques est venu me voir et m’a dit qu’il avait mal conduit, qu’il n’était pas content de lui, qu’il avait laissé des valises à chaque montée en loupant son freinage au bas de la descente. C’était sans doute un peu vrai, car à la régulière, il aurait dû devancer Christine. Mais je savais qu’il enfonçait le clou pour essayer de me casser le moral.

    Sébastien Ménier : En vain, je suppose.
    Éric Trélor : Tout à fait. Je l’ai laissé parler et je lui ai affirmé que j’avais assuré à mort, parce que je n’étais encore tout à fait remis. C’était vrai aussi. J’ai ajouté qu’il y avait des résidus d’huile dans le droite d’arrivée, que j’avais roulé sur des œufs. Comme ça, il gambergerait en se demandant quel temps je valais vraiment. Christine paraissait ravie. Elle sous-estimait nos soucis et pensait vraiment avoir marqué un point sur nous. C’était humain. Sa Triumph était très dure à amener en côte. Elle crut nous devancer à la régulière et avoir mis le doigt sur le réglage qui la mettrait enfin en tête de la catégorie 2 litres en groupe 1.

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     Sébastien Ménier : Et le jour de la course arriva enfin.
    Éric Trélor : Bien sûr. Le samedi soir d’abord, nous sommes restés dîner au parc fermé où nous campions. Stéphane et sa compagne nous avaient gâtés. Mais je n’avais pas très faim. J’ai juste mangé un peu de melon, un œuf dur et une tranche de viande froide. Je suis allé me coucher à 9 heures. Je crois que c’est la seule fois où ça m’est arrivé un soir de course. Pas question d’apéro. Il y avait pourtant tout ce qu’il fallait, Ricard, Whisky, Martini, avec le saucisson sec et les cahuètes. Ça ne m’a pas empêché de l’offrir à Luc Crillon et Ronnie venus aux nouvelles. J’étais tellement épuisé que je me suis endormi comme une bûche. Je n’ai même pas entendu Mikaël rentrer dans la tente deux heures plus tard. Lui n’était pas malade. Il était resté boire quelques pots sous l’auvent du J9 avec Stéphane et les autres, dont Luc et Ronnie, revenus voir l’équipe après un dîner dans un resto d’Ancenis. Le dimanche matin, je me suis réveillé en pleine forme. J’ai bien pris garde de ne pas rester au soleil ni sous la tente. Il faisait encore très chaud. La course commençait à 14 heures. Elle se disputait à la meilleure des deux manches courues. A chaque manche, les voitures du groupe 1 débutaient les hostilités par ordre de cylindrées croissantes. Puis viendraient les voitures de tourisme spécial (groupe 2), les GT de série (groupe 3) telles que les Simca 1200 S comme celle de Ronnie, Alpine Renault et Porsche, les GT (groupe 4), les silhouettes (groupe 5) parmi lesquelles figurait une Escort à moteur de Formule 2, les barquettes (groupe 6) et les monoplaces. Je me rappelle que Jean- Philippe Grand faisait figure d’épouvantail en groupe 6 avec son proto Lola 2 litres et que Yves Courage, qui deviendrait constructeur de protos quelques années plus tard, comptait parmi les favoris parmi les monoplaces avec Debias et Tarrès, je crois.

    Sébastien Ménier : La course commençait à quelle heure ?
    Éric Trélor : 14 heures, comme les essais. Moi, je partais vers 14 heures 40. Il y avait les Autobianchi Abarth, toutes les Rallye 2, les Golf GTI, Audi 80 GTE et Toyota Celica 1,6 litre, et toutes les autres 2 litres avant. En fait, j’utilisais toujours une astuce. Quand je remplissais ma fiche d’engagement, je mettais 2 litres au lieu de la cylindrée réelle qui devait être de 1962 cm3 si je me rappelle bien. Résultat, comme tous les autres remplissaient scrupuleusement leur feuille avec la vraie cylindrée, ils partaient avant moi. Jacques Dumoulin a fini par comprendre mon manège et il m’a imité. Mais comme son nom de famille commençait par un D et le mien par un T, l’ordre alphabétique le faisait tout de même partir devant moi.

    Sébastien Ménier : Connaissais-tu les temps de tes concurrents quand tu partais ?
    Éric Trélor : Non. J’étais déjà casqué et sanglé dans ma voiture quand ils attaquaient leur montée. Et puis, le speaker n’annonçait pas toujours les temps pour ménager le suspense. Mais par contre, ma stratégie servait bien Ker Etel sur les circuits. Parce que, partant le dernier, le speaker parlait forcément de moi avec des commentaires du style « Éric Trélor, le pilote Ker Etel est au départ au volant de son Alfa GTV. On le sait, Éric fait partie des hommes forts de cette catégorie 2 litres du groupe 1. D’ailleurs jusqu’à présent cette saison, seul Jacques Dumoulin, le pilote de l’Alfa blanche qui vient de passer devant vous dans une attaque absolument ahurissante, a été capable de lui donner la réplique. Vous l’aurez constaté durant les essais, Jacques et Éric ne se feront pas de cadeau sur la piste. Pourtant ces deux garçons se connaissent bien. Ils ont usé leurs fonds de culottes sur les bancs du même lycée, tout comme d’ailleurs Luc Crillon, un des princes de la Rallye 2, à peine plus jeune qu’eux. Vous les verrez souvent discuter ensemble ou trinquer à l’apéritif le samedi soir au parc fermé. Mais aujourd’hui sur la piste, il n’y a plus de copains. C’est chacun pour soi. Et croyez moi bien, ces deux garçons vont vous donner le spectacle auquel vous avez droit. Ça y est, l’Alfa Ker Etel d’Éric Trélor est en piste. Le GTV rouge arrive très très vite dans la descente. Oh là là, il me fait peur Éric Trélor sur ce coup-là. Non, il freine impeccablement à son point de repère, et ça passe en légère dérive des quatre roues dans le gauche… » Les speakers savaient faire monter la pression dans le public. Ça faisait partie de la fête, tout simplement. Moi, je n’entendais pas les commentaires, mais Mikaël me les racontait après.

    A suivre…

     

    NOTE MODIFIEE LE 14 AOÛT 2015

     

    QUELQUES LIENS A SUIVRE

     

    Un bon souvenir de course de côte à Neuvy Le Roy http://bit.ly/1nwCCoA

     

    Présentation de l’auteur du feuilleton http://bit.ly/1IunQ9N

     

    Quand Ronnie jouait et gagnait contre Ferrari http://bit.ly/1BmWlxQ

     

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    Thierry Le Bras

  • DUEL AU SOLEIL DES COTEAUX (2)

    FEUILLETON AUTOMBILE

    Courses de côtes, Alfa Romeo, 2000 GTV, Talbot Rallye 2,  groupe 1, Simca 1200 S, groupe 3, Pouillé les Coteaux, camping, feuilleton, fiction

    Suite du premier épisode  mis en ligne ICI http://bit.ly/1trq9Df 
     
    Quelques fictions en plus d’infos sur la course auto, tel est le programme du blog CIRCUIT MORTEL Bien sûr, les histoires qui se déroulent dans l’univers de David Sarel, le héros récurrent de mes romans, sont privilégiées. Éric Trélor, parrain de David Sarel, raconte ici au journaliste Sébastien Ménier une course de côte qui l’a particulièrement marqué au début de sa carrière de gentleman driver.

    Sébastien Ménier : Tu te présentes à Poullé-les-Coteaux dans quelles dispositions ?
    Éric Trélor : Très serein et très confiant dans mes chances de victoire. Je suis arrivé assez tard le vendredi soir, vers minuit, avec Mikaël Mermant qui me naviguait en rallye et m’accompagnait toujours sur les courses de côtes. Je roulais au quotidien avec un coupé Alfa 1600 à cette époque. Je m’en servais aussi souvent pour les reconnaissances. Le coupé 1600 possédait la même caisse que le 2000 GTV et un comportement assez semblable. Notre équipe d’assistance, composée de Michel Nopert et André Galliard était déjà là. Ils avaient amené le 2000 GTV sur plateau derrière un fourgon Peugeot J9. Avec Mikaël, nous avons monté notre tente en quelques minutes et nos sommes allés dormir. Ces années-là, nous campions tous dans le parc fermé et nous utilisions les douches et les sanitaires du terrain de foot municipal.

    Sébastien Ménier : Pas de grasse matinée au programme, je présume.
    Éric Trélor : Non. A 6 heurs 30, je reconnaissais le circuit avec le 2000 GTV avant que les gars chargés de mettre les bottes de paille n’arrivent. Je n’étais pas le seul d’ailleurs. D’autres pilotes, comme Jacky Ravenel qui engageait une Opel Commodore GSE, reconnaissaient très tôt le matin.

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    Sébastien Ménier : Pas Jacques Dumoulin.
    Éric Trélor : Non. Lui, il avait reconnu la veille au soir. Au fait, je me rappelle qu’il tournait encore quand nous étions arrivés le vendredi. Par contre, d’autres copains faisaient comme moi. Luc Crillon, par exemple, qui courait sur une Talbot Rallye 2 rouge. Sans oublier Ronan, qui était surnommé Ronnie, parce qu’il était blond et assez costaud comme Ronnie Peterson. Lui pilotait un coupé Simca 1200 S en groupe 3. Nous nous connaissions très bien depuis l’enfance. D’ailleurs, comme il ne courait qu’en côte, il nous faisait souvent l’assistance en Rallye. Et j’allais oublier Christine Verrec, qui pilotait une Triumph Dolomite rouge et noire. Mess relations avec elle étaient tendues. Elle ne m’avait jamais battu malgré la puissance de sa voiture et les bons résultats qu’elle avait collectionnés en circuit. En fait, sa Triumph manquait de rendement en course de côte et il aurait fallu la piloter très brutalement, ce qu’elle se refusait à faire. Alors, elle nous accusait Jacques et moi de courir avec des voitures non conformes – ce qui était faux – et menaçait avant chaque course de nous faire contrôler, ce qu’elle n’a finalement jamais osé entreprendre bien que nous l’ayons toujours battue.

    Sébastien Ménier : L’ambiance était bonne en général ?
    Éric Trélor : En général, oui. Les courses de côte représentaient une vraie fête de la course auto à cette époque. Nous étions souvent plus de 120 au départ. Beaucoup de jeunes s’essayaient à la compétition. Bernard Tapie par exemple, un peu plus vieux il est vrai, a tâté de la course dans sa jeunesse. Luc Crillon, que je citais tout à l’heure, avait aussi été élève dans le même lycée que moi. Nous nous amusions vraiment bien et nous nous prenions moins au sérieux que les pilotes d’aujourd’hui. Sans doute parce que la course coûtait moins cher.

    Sébastien Ménier : Pour en revenir à ce week-end de juillet 1977 donc, tu commences les reconnaissances très tôt.
    Éric Trélor : Nous nous organisions avec les autres pilotes. Nous montions en nous suivant à quelques secondes. Des membres de nos équipes se postaient à tous les virages et nous indiquaient si la piste était libre. Puis nous redescendions tous ensemble et nous recommencions.

    Sébastien Ménier : Les riverains ne se plaignaient pas ?
    Éric Trélor : Non, au contraire. Ils nous aidaient à organiser la circulation. De temps en temps, des jeunes du pays nous demandaient si nous pouvions les amener faire une montée. Je faisais toujours les premières montées avec Mikaël pour qu’il m’annonce les notes comme en rallye. Puis après, quand je connaissais le circuit par cœur, j’acceptais d’embarquer des passagers. Ça faisait plaisir aux gens de la région. Ils devenaient de sacrés supporters pour le week-end. Souvent, ils se mettaient en quatre pour nous aider et trouver quelque chose à faire qui nous fasse plaisir. D’année en année, ils revenaient nous voir. C’était un aspect vraiment très sympa de la compétition qu’on ne retrouve plus beaucoup aujourd’hui, à l’exception de quelques épreuves comme le Rallye du Pays Vannetais à Malansac.

    Sébastien Ménier : La suite du programme ?
    Éric Trélor : A 8 heures 00, j’avais fini les reconnaissances. Et là, je commets une erreur. J’étais fatigué. Je dis à Mikaël, je vais me reposer un peu sous la tente. Réveille moi vers 9 heures 30. Je m’allonge sur mon sac de couchage et je me rendors. A l’heure convenue, Mikaël me réveille. Il était allé cherché des croissants et le journal au village. André et Michel avaient préparé le café. Mais je ne me sentais pas bien du tout. Le soleil tapait déjà fort. J’avais attrapé un début d’insolation sous la tente.

    Sébastien Ménier : Tu comptais courir quand même ?
    Éric Trélor : Bien sûr. Pas question de renoncer. Il fallait gérer. Mikaël m’a amené à une pharmacie. Une préparatrice m’a donné quelques médicaments. Nous sommes revenus sur le circuit. Nous avons passé la voiture aux vérifications techniques. Il faisait de plus en plus chaud et je me sentais de plus en plus mal. Je me suis efforcé de boire beaucoup, de suivre les prescriptions de la préparatrice et de rester à l’ombre. Les essais commençaient à 14 heures. Il fallait que je fasse au moins une montée pour avoir le droit de courir le dimanche. Nous avons décidé que je tenterais une montée dès l’ouverture de la piste pour le cas où mon état s’aggraverait. Puis j’attendrais la fin de l’après-midi. Si ça allait mieux, je ferais ma deuxième montée d’essais. Sinon, je la zapperais. Notre copain Stéphane Paulin et sa compagne sont arrivés en fin de matinée. Stéphane avait monté avec son père la biscuiterie Ker Etel deux ans plus tôt. Il faisait partie de nos sponsors. Non seulement sa pub était sur la voiture, mais il distribuait des crêpes et galettes Ker Etel ainsi que des posters au public les jours de courses et d’essais. Il faisait aussi de la pub dans les journaux locaux et à la sono du circuit. Il s’occupait enfin de l’intendance de l’équipe. C’était lui, avec sa compagne, qui préparait tous les repas de l’équipe. Stéphane et sa compagne étaient beaucoup plus que de simples sponsors ; ils étaient et sont restés des amis fidèles et des partenaires privilégiés.

    Sébastien Ménier : As-tu pu effectuer tes montées d’essais ?
    Éric Trélor : Comme prévu, je me suis présenté parmi les premiers sur la ligne de départ à 14 heures. Il faisait une chaleur infernale dans la voiture. Je transpirais. J’étais limite d’avoir des nausées. Je n’ai pas attaqué du tout. Mikaël avait prévenu le speaker afin qu’il mentionne mon indisposition. Je ne voulais pas que le public pense que je n’avançais pas. D’autant que ça n’aurait pas été valorisant pour les produits de Stéphane ni les autres sponsors. Après chaque montée, nous redescendions par le circuit. La direction de course venait nous chercher quand il y avait une trentaine de voitures en haut. J’ai eu la surprise d’être très applaudi en redescendant, comme si j’avais fait une super-perf. J’ai garé la voiture au parc fermé et je me suis allongé sur un matelas pneumatique à l’ombre du J9. Toute l’équipe m’a chouchouté, Mikaël en tête.

    Sébastien Ménier : As-tu pu réaliser ta seconde montée ?
    Éric Trélor : A 17 heures, je me sentais beaucoup mieux. Pas encore la forme des grands jours, mais capable de faire une vraie montée.

    A suivre...

    NOTE MODIFIEE LE 13 AOÛT 2015

     

    QUELQUES LIENS A SUIVRE

     

    Courses de côtes des 70’s, ou le temps des copains http://bit.ly/1eNpUwy

     

    Première sortie de piste pour Ronan  http://bit.ly/1vAtOq5

     

    Communication, storytelling, histoire d’un partenariat  sportif performant http://bit.ly/Nnwk6Y

     

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    https://twitter.com/ThierryLeBras2

     

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    Thierry Le Bras