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  • MIKE BEUTTLER, PRIVÉ DE GLOIRE

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    Mike Beuttler, pilote de F1 au début des années 70

     

    Vous souvenez-vous du moment précis où est né votre passion pour la course automobile ?

     

    Philippe Vogel, auteur d’une biographie remarquablement documentée sur Mike Beuttler, se rappelle très bien l’instant magique qui le rendit sensible aux rugissements des bolides menés par des pilotes. C’était le 15 juin 1969, lors des dernières minutes de l’incroyable duel que se livraient la Porsche 908 de l’équipage Larrousse – Hermann et la Ford GT 40 de Jacky Ickx  associé à Jackie Oliver. Après près de 24 heures de course, les deux voitures rivales roulaient roues dans roues. Tout allait se jouer dans le dernier tour. Un suspense haletant. Chez Porsche, le team avait décidé de laisser Hans Hermann assurer le dernier relais. Chez John Wyer, le jeune Jacky Ickx allait défendre les couleurs du team et du géant Ford. 1969, c’était encore un départ type Le Mans où les pilotes traversaient la piste en courant pour bondir dans leurs voitures et s’élancer pour un premier relais de folie sans prendre la peine de s’attacher. La veille, Jacky Ickx a traversé la piste en  marchant, a  pris le temps de s’attacher et a démarré en  queue de peloton. La course serait longue. Mais maintenant, à 2 minutes de l’arrivée, il faut finir au sprint, comme en F1. Hans Hermann, trop impatient dans le premier tiers des Hunaudières, se fera coiffer au poteau par le pilote belge…

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    Philippe Vogel, équipé d’un casque et d’une combinaison aux couleurs de Mike Beuttler

     

    Philippe Vogel a attrapé le virus de la course automobile. Il lit les magazines spécialisés, regarde les reportages de l’ORTF, colle son oreille au transistor les jours de Grands-Prix, suit tout particulièrement les performances de Jacky Ickx. Il s’attachera aussi à dessiner les plus belles machines qui font vibrer les spectateurs au bord des pistes d’endurance et de F1. Il ne connaît encore Mike Beuttler.

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    En 1969, Mike a 29 ans et il court en F3. Il a entamé sa vraie carrière de pilote dans cette discipline en 1967 après deux saisons plus légères en Formule Junior. Philippe le découvrira en 1972, au Grand-Prix de Belgique où l’a amené son oncle. C’est d’abord le casque du pilote anglais qui attirera son attention, un casque bleu métallisé aux parements blancs qui rappelle celui de Jacky Ickx. Mike Beuttler pilote une March jaune. La voiture participe au championnat grâce à des financements privés assurés par des amis du pilote, des amis financiers à la City de Londres.

     

    Mike Beuttler va devenir le pilote préféré de Philippe Vogel qui est encore adolescent. Mike est un excellent pilote. Il a remporté 3 courses de F3 en 1969, celles de Silverstone, Brands Hatch et Montlhéry. Sur le circuit français, il s’est imposé devant un certain Bob Wollek qui devait devenir ensuite un des meilleurs pilotes d’endurance de son époque au point de faire équipe au Mans 1978 avec un certain … Jacky Ickx. En 1971, Mike Beuttler court en F2 et remporte l’épreuve de Vallelunga. Il participe aussi au GP du Canada sur une March officielle. Puis en 1972 et 1973, il prend le départ de 28 Grand Prix et 8 courses hors championnat au volant de monoplaces engagées par le team financé  par ses amis, une écurie appelée Clarke-Mordaunt-Guthrie Racing, puis Clarke-Mordaunt-Guthrie-Durlacher Racing.

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    Mike Beuttler

     

    C’est au Grand-Prix de Zolder en 1973 que Philippe Vogel a la joie de faire la connaissance de Mike Beuttler. Le pilote de Formule 1 se révèle un gentleman sympathique et bien élevé qui se souvient du courrier que lui a adressé son jeune supporter quelques semaines plus tôt. Il il prend le temps de bavarder quelques minutes avec lui. Les Tyrell de Stewart et Cevert réussissent le doublé. Mike abandonne sur sortie de route. Mais qu’importe, Philippe Vogel sait désormais que l’homme Mike Beuttler est à la hauteur du pilote, un personnage attachant, généreux, sympathique. Il rêve de le voir monter sur des podiums, remporter des Grands-Prix, et pourquoi pas un titre ? Malheureusement, Mike ne courra pas en F1 en 1974. Le Grand-Prix de Watkins Glen, celui-là même où François Cevert trouva la mort, serait sa dernière course dans la discipline reine. Mike ne ferait plus qu’une apparition en course, aux 1000 km de Brands Hatch 1974. Il se lança ensuite dans les affaires aux US et disparut en 1988, victime d’une maladie cruelle que la médecine n’a pas encore réussi à vaincre malgré ses efforts et ses progrès, le sida.

     

    Qui fut Mike Beuttler ? Un pilote très rapide qui ne toucha pas les dividendes de ses efforts sous la forme de victoires en Formule 1. Pourquoi ? Parce que pour remporter des Grands-Prix, il faut un concours de circonstances parfait. Car le talent du pilote ne fait pas tout. Il lui faut une bonne machine pour s’exprimer, un team qui tienne la distance sur l’ensemble de la saison, une gestion interne qui ne le sacrifie pas aux intérêts de son équipier, des médias qui assurent sa promotion ou tout au moins ne lui nuisent pas, de bons conseillers capables de manœuvrer dans un milieu que Nico Rosberg qualifia en son temps de parc de requins. Non, la rage de vaincre et le coup de volant ne font pas tout. Certains facteurs de réussite échappent au contrôle du pilote et relèvent d’autre chose que certains appelleront hasard et d’autres destin.

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    Privé de gloire, l’ouvrage que Philippe Vogel a consacré à Mike Beuttler

     

    Au volant d’une F1 privée, Mike Beuttler ne trouva pas ce concours de circonstances et resta donc un pilote privé de gloire. Qui fut Mike Beuttker ? Philippe Vogel a décidé de le raconter dans un livre incroyablement bien documenté qui lui a demandé 5 années de recherches et de travaux. Un ouvrage salué par l’ensemble des journalistes spécialisés. Un ouvrage préfacé par un autre pilote rapide et attachant qui méritait lui-aussi un concours de circonstances à la hauteur de son talent, un Français affectueusement surnommé Godasse de Plomb, Jean-Pierre Jarier.

     

    L’ouvrage comporte 340 pages et 600 photographies. Il est disponible par correspondance auprès de l’auteur :

    * prix : 75 € + frais de port (9,10 € pour envoi France et 17,00 € pour un envoi Europe/UK)

    * Contacts :

    Phinorman@wanadoo.fr

    Ou sur

    http://mikebeuttler.hautetfort.com 

     

    Philippe Vogel se laissera-t-il tenter par d’autres biographies de pilotes dans l’avenir ?  Mike Beuttler fut son pilote préféré et il s’attache avant tout à le faire connaître  au travers de son ouvrage. Mais notre biographe n’exclut pas de travailler plus tard sur les histoires de Brett Lunger, un autre privé, américain. Sinon, le Sud-africain George Fouché et le Mexicain Michel Jourdain Jr recueillent aussi toute sa sympathie.

     

    Thierry Le Bras

  • 1973, UNE VICTOIRE ALPINE A LA FIN DE L’ÂGE D’OR AUTOMOBILE

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    Jean-Claude Andruet et sa navigatrice Biche

     

    1973. L’amour de l’automobile habite encore le cœur d’une grande partie de la population française. Chaque constructeur affirme son caractère propre en adoptant des lignes spécifiques. L’essence coûtait moins d’un franc cinquante centimes le litre. Des matériaux nobles, du cuir et du bois, ornaient les habitacles des voitures sportives. Les publicitaires basaient leurs campagnes de communication sur la performance. BMW représentait une calendre qu’il fallait se résoudre à laisser doubler, à moins d’acheter un véhicule de sa marque, tandis qu’Alfa Roméo prévenait que toute personne qui conduirait ses modèles serait  atteinte par un virus qui la contraindrait à en faire l’acquisition. Le début des années soixante-dix symbolisait en quelque sorte le paradis des automobiles.

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    Gérard Larrousse, pilote très complet, gagnera Le Mans en juin sur Matra

    après un magnifique Monte-Carlo en janvier sur Alfa Roméo 2000 GTV groupe 1

     

    Quelques mois plus tard, la crise pétrolière allait traumatiser le monde occidental. Le renchérissement du prix du carburant, les menaces de rationnement, la culpabilisation de la conduite sportive et des limitations de vitesse draconiennes transformeraient le regard des Français sur les voitures. Surtaxée fiscalement, brimée par les pouvoirs publics, accusée de tous les maux dont  souffre le monde moderne, l’automobile se banaliserait pour se muer peu à peu en simple objet utilitaire.

     

    Un plateau de rêve

     

    Mais de toute cela, ni de l’annulation du Rallye 1974 au nom des économies d’énergie, les concurrents du Monte-Carlo 1973 ne se doutaient pas lorsqu’ils préparaient leur participation à la plus belle course routière de l’année.

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    La compétition s’annonçait  magnifique. Alpine engageait cinq  voitures officielles pour Andruet, Andersson (navigué par un certain Jean Todt dont les talents d’organisateur s’exprimèrent en qualité de coéquipier avant de lui permettre de présider aux destinées d’écuries prestigieuses puis de la FIA), Darniche, Nicolas, et Thérier. Quatre pilotes privés particulièrement talentueux défendaient aussi les couleurs de la marque française : Piot, Wollek, Ballot-Léna et Pat Moss-Carlsson (la sœur de Stirling Moss et l’épouse du pilote suédois Erik Carlsson). Équipées de moteurs 1800 cm3 d’une puissance de 165 chevaux, les voitures bleues faisaient figure de favorites. Afin de tenter de les contrer, Cesare Florio, alors patron de l’écurie Lancia, présentait quatre Fulvia HF dont l’une serait conduite par son meilleur pilote, Sandro Munari. Les  puissantes Ford Escort de Mikkola et Makinen ainsi que le coupé Fiat 124 Abarth de Waldegaard espéraient également tirer leur épingle du jeu. Thierry Sabine (Alpine),  Marie-Claude Beaumont (Opel Ascona), Walter Röhrl (Opel Commodore GSE),  Jean Ragnotti et Patrick Tambay (R 12 Gordini), Bernard Fiorentino (Simca 1000 Rallye 2), Gérard Larrousse (Alfa Roméo 2000 GTV) et Guy Chasseuil (BMW), autant de pilotes dont les noms resteraient dans l’histoire du sport automobile, tenteraient de s’approprier la victoire dans leurs catégories respectives.

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    Walter Röhrl à l’attaque avec sa Commodore GSE

     

    La course commença par une déception pour le clan Alpine. Au terme du premier secteur chronométré, la première Berlinette ne pointait qu’en sixième position, dominée par la Lancia de Munari, les deus Ford Escort et une Fiat Abarth. Certes, les Alpine avaient supporté les conséquences d’un concours malheureux de circonstances sous la forme d’une route plus enneigée que celle rencontrée par leurs adversaires. Ce résultat risquait cependant de porter  atteinte au moral  de  l’équipe.

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    Pat Moss Carlsson, si proche d’une nouvelle Coupe des Dames

     

    Dès les deux spéciales suivantes, les Alpine rassurèrent leurs supporters et revinrent à la pointe du combat, sans toutefois distancer leurs principales rivales. Munari et Mikkola demeuraient dangereux. Les mésaventures et les frayeurs n’épargnaient pas certains équipages. Piot calait après avoir tapé un mur de neige. Victime d’une sortie  de route, Bob Wollek voyait sa Berlinette s’immobiliser au bord d’un  ravin, deux roues au-dessus du vide, tandis que Munari crevait et terminait la spéciale en roulant sur la jante.

     

    Déceptions et confusion

     

    Puis une confusion totale régna sur la compétition. Une soixantaine de pilotes avaient déjà franchi le Burzet lorsqu’une sortie de route provoqua une interruption de la course. Quand un nouveau départ fut donné de longues minutes plus tard à la Camaro de Rouget, des congères s’étaient formées sous l’effet conjugué de la neige et du vent.

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    Jean-Pierre Rouget envoyait fort avec la Camaro

     

    L’énorme Chevrolet s’immobilisa en travers de la chaussée étroite, interdisant le passage aux voitures suivantes. Quatre heures plus tard, les ponts et chaussées n’avaient toujours pas dégagé la voie. Les organisateurs adoptèrent la  solution la plus brutale, c'est-à-dire  mettre hors course les cent quarante concurrents bloqués au départ de la spéciale. Ces derniers ne pouvaient pas se satisfaire d’une décision aussi injuste. Ils rejoignirent le rallye à Digne afin d’expliquer leur situation aux autres participants et de tenter de fléchir l’organisation en bloquant la course. Ses représentants ne voulurent rien entendre, faisant fi de l’indignation légitime des équipages prématurément éliminés. Quant aux concurrents encore en course, ils échappèrent aux barrages établis par les contestataires en pratiquant le tout-terrain à travers les champs enneigés.

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    Mikkola, meilleur représentant du Clan Ford

     

    Décidément peu inspirés cette nuit-là, les mêmes organisateurs infligèrent à Jean-Claude Andruet une pénalisation imaginaire de trois  minutes et le créditèrent d’un temps erroné. Le sort sembla s’acharner sur le pilote Alpine lorsqu’il partit en tête-à-queue sur une plaque de neige. Ces contrariétés n’affectèrent nullement la combativité d’Andruet qui continua à donner la pleine mesure de son talent sans jamais se décourager. Seul Munari aurait pu lui résister cette nuit-là, mais une sortie de route l’élimina définitivement. Sa fausse pénalisation annulée et ses temps rétablis, Andruet terminait le parcours commun du rallye en tête devant ses coéquipiers Andersson (à 1’ 44’’) et Nicolas (à 3’ 06’’) ; la Ford Escort de Mikkola suivait à 3’  25’’. Tous les autres adversaires de l’équipe française avaient abandonné ou étaient désormais attardés.

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    L’équipage Andersson – Todt opposera une résistance farouche à Andruet - Biche

     

    Rien n’était encore  acquis cependant pour Alpine. Il restait une nuit de  course,  celle du parcours complémentaire au cours duquel les pilotes  disputeraient sept épreuves spéciales, soit cent cinquante kilomètres de course pure. Jacques Cheinisse, le patron de l’écurie, souhaitait que ses pilotes restent sur leurs positions, que leur duel ne compromette pas les chances de la marque. Une franche camaraderie régnait au sein de l’écurie. Jean-Luc Thérier avait même proposé que les pilotes partagent toutes les primes d’arrivée lors des  rallyes du Championnat du monde. Cette solidarité primerait-elle sur les désirs individuels de gagner le Monte-Carlo ?

     

    Duel au bout de la nuit

     

    D’entrée de jeu, sur route sèche,  Andersson répondit par la négative. Andruet, qui n’avait pas pu trouver le sommeil la nuit précédente, se sentait angoissé. Craignant à la fois la sortie de route éliminatoire et la performance de son  rival, il perdit dix-neuf secondes dans la première spéciale. Dans la seconde, le célèbre Turini, le pilote nordique se rapprocha encore de onze secondes, mais Andruet reprenait confiance et estimait que son avance pouvait lui permettre de résister. Il réalisa le meilleur temps dans la troisième spéciale.

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    Crevaison pour Jean-Claude Andruet

     

    Puis la course sembla basculer lors du second passage du Col du Turini. Andruet creva, perdit plus de deux minutes et se retrouva troisième à une  minute cinq secondes d’Andersson et dix secondes de Jean-Pierre Nicolas. Biche, sa navigatrice, s’efforça de le réconforter et l’incita  à se battre jusqu’au bout de  la course. Bien lui en prit. Dès l’épreuve suivante, Andersson commit une faute de pilotage qui lui coûta quarante-cinq secondes. Andruet domina une nouvelle fois  son adversaire dans le sixième tronçon chronométré et reprit la tête du rallye pour quatorze secondes. La septième et dernière spéciale serait décisive. Andersson se livra à fond. Lorsque son temps fut annoncé, les visages d’Andruet et Biche se contractèrent ;  leur concurrent venait de  battre le record de l’épreuve. Quelques secondes plus tard, leur joie éclata. Ils avaient à nouveau devancé Andersson et remportaient le Rallye de Monte-Carlo.

     

    Malgré une panne d’essence dans les derniers hectomètres de course, Jean-Pierre Nicolas conservait la troisième place, assurant un triplé Alpine. Le championnat s’annonçait sous les meilleurs auspices pour l’équipe française. Il se terminerait par l’obtention du titre mondial des marques à l’automne 1973.

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    Jean Ragnotti offre une nouvelle victoire de groupe à la R 12 Gorde

     

    Même si leurs performances furent quelque peu éclipsées par l’extraordinaire combat que se livrèrent les  pilotes d’Alpine, d’autres concurrents méritèrent de figurer au Tableau d’honneur de ce rallye. Parmi eux, Gérard Larrousse, premier en tourisme de série au volant de son Alfa Roméo 2000 GTV,  Jean Ragnotti et Bernard Fiorentino, vainqueurs de leurs catégories respectives, Jacques Henry, meilleur amateur, ainsi que Pat Moss-Carlsson qui était proche de remporter sa neuvième Coupe des Dames lorsque sa boite de vitesses cassa, la contraignant à l’abandon.

     

    Thierry Le Bras

  • HISTOIRES DE MONTE-CARLO

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    L’équipage Thérier – Callewaert au Monte-Carlo 1969

     

    Qu’évoque le Monte-Carlo aux yeux du grand public ? Certains pensent d’abord aux casinos et à l’univers du jeu. Les cinéphiles se remémorent le mariage de Grace Kelly avec le prince Albert. Les avocats internationaux considèrent avant tout la Principauté comme un Paradis fiscal accessible à tout titulaire d’une grande fortune à condition qu’il ne soit pas français. D’autres encore rêvent aux voitures prestigieuses, aux yachts magnifiques, aux toilettes achetées chez les grands couturiers et aux bijoux conçus par les meilleurs joailliers, autant d’objets luxueux qui fleurissent dans ce cadre paradisiaque.

     

    Mais pour les amateurs de sport, Monte-Carlo symbolise en priorité trois événements majeurs internationaux : le tournoi de tennis, le Grand-Prix de Formule 1 le plus célèbre du monde, et le rallye que tous les pilotes ainsi que toutes les écuries veulent absolument inscrire à leur palmarès. Normal, parmi les Rois de Monaco figurent des champions aussi remarquables et charismatiques que Rafael Nadal, Ayrton Senna et Sébastien Loeb !

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    Une naissance difficile

     

    Il faut remonter à1911 pour découvrir l’origine du Rallye de Monte-Carlo. Il ne s’agissait pas alors d’une véritable compétition, mais plutôt d’un concours d’élégance original. Jalouse de la prépondérance que s’efforçait de conquérir Nice, la rivale voisine sur la Côte d’Azur, et consciente de l’effet attractif de la course Paris-Nice puis de la semaine automobile organisée dans la même cité, les professionnels du tourisme décidèrent de riposter. Afin de conférer à leur manifestation une audience internationale, ils mirent au point un règlement complexe qui imposait aux concurrents de partir de la capitale de leur pays. Le classement prenait en compte le kilométrage parcouru, la moyenne réalisée, le nombre de personnes transportées, le confort offert aux passagers et l’état du véhicule à l’arrivée. Les conducteurs ne devaient pas dépasser une moyenne de 25 kilomètres à l’heure. N’oublions pas qu’étymologiquement, rallye signifie rassemblement et non course de vitesse.

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    Cette réglementation se révéla aussi incompréhensible pour le public et les journalistes qu’injuste pour les concurrents. A titre d’exemple, en 1912, Nagel part de Russie au volant d’une voiture fabriquée par la société Russo-Baltique. Après deux jours de course, il adresse un message significatif : « j’arriverai si les loups ne nous mangent pas en route et si nous ne gelons pas tout vif ». Il fait si froid que lorsque le pilote s’arrête dormir, il doit se lever et faire tourner le moteur toutes les deux heures pour éviter que l’huile ne se fige. Nagel arrivera le premier à Monaco après avoir parcouru à peu près deux fois plus de kilomètres que les concurrents partis de Berlin parmi lesquels figure le futur vainqueur, le capitaine Von Esmach. Quant à Nagel, il ne sera classé que neuvième. Comprenne qui pourra !

     

    Le rallye n’aura vécu que deux années sous cette forme initiale. La complexité des méthodes de classement et la première guerre mondiale faillirent le tuer.

     

    Un nouveau départ

     

    Il faudra attendre 1924 pour que la troisième édition s’organise. Peu à peu, des épreuves de régularité, d’adresse et de vitesse pure furent ajoutées au programme. Ces épreuves devinrent déterminantes dans les années 50. Le Rallye de Monte-Carlo se métamorphosa enfin en vraie compétition, même si le parcours de concentration était maintenu comme une sorte d’hommage à la tradition ancestrale.

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    Outre ce prologue à la course véritable, la spécialité du Monte-Carlo réside dans l’époque et le lieu qui lui servent de cadre. Le mois de janvier s’avère fréquemment le plus rude de l’hiver, surtout dans les régions montagneuses. La neige et le verglas furent souvent fidèles au rendez-vous. Les conditions rencontrées varient parfois énormément au long d’une même épreuve spéciale en fonction de l’altitude et des caprices soudains des dieux du ciel. De tout temps, ces aléas, s’ils élevèrent le Monte-Carlo au rang de légende, en firent aussi une course redoutable.

     

    Ils contribuèrent également à l’apport technologique incontestable de ce rallye à l’automobile de série. Les pneumatiques cloutés y furent utilisés pour la première fois, de même que les lampes à iode, les phares antibrouillard, l’alternateur et le lave-glace.

     

    Des vainqueurs parfois inattendus

     

    Ces conditions météorologiques particulières expliquent la variété des voitures qui se sont imposées en Principauté. C’est ainsi que sur la liste des vainqueurs successifs, de modestes Renault Dauphine, Panhard, Saab 850 cm3 ou Mini Cooper côtoient sans complexes de puissantes DS, Mercedes, Jaguar ou Porsche.

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    A propos du duel entre les Cooper et les DS, je vous invite d’ailleurs à consulter la note dont le lien suit. Il s’agit d’un docu-fiction un peu humoristique sur le retour de la DS, mais j’y ai intégré très fidèlement quelques éléments des duels Citroën contre Cooper sans omettre les conséquences qui faillirent en résulter pour le rallye en 1966 :

    http://circuitmortel.hautetfort.com/archive/2009/11/06/le-retour-de-la-ds-citroen.html

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    Même si comme dans tous les ports mécaniques, le rôle de la machine se révéla souvent prépondérant, il ne faudrait pas nier l’importance des pilotes et de leurs navigateurs, car le Monte-Carlo n’a couronné que les plus grands. A côté des pilotes engagés par les usines, nous n’omettrons pas les amateurs, fréquemment doués, qui durant des décennies, ont constitué le plus gros du plateau au prix de sacrifices financiers considérables. Sans eux, le rallye n’aurait pas obtenu ses lettres de noblesse.

     

    Il n’aurait pas davantage conquis sa notoriété extraordinaire sans l’enthousiasme des spectateurs. Bravant la neige et le froid, ils n’hésitent pas rester postés durant de longues heures au bord des routes, se réchauffant auprès des feux de camp, dans l’attente d’apercevoir quelques brefs instants le spectacle magique de voitures volant ou glissant de virage en virage entre les mains de virtuoses du pilotage.

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    Le Monte-Carlo a évolué pour s’adapter au format des rallyes du Championnat du monde WRC. Puis il est sorti de la liste des épreuves comptant pour ce championnat et figure maintenant au calendrier IRC. Sa couverture médiatique s’en ressentira forcément malgré la présence de pilotes très rapides.

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    Et si la nostalgie des meilleures années de l’automobile vous habite, ou si vous avez simplement envie de voir quelques VHC sur les routes de montagne, n’oubliez pas le Monte-Carlo historique qui se déroulera du 28 janvier au 3 février 2010 !

     

    Thierry Le Bras