dans Au nom du fils
Le premier tome de la saison 2 est enfin dans les bacs après 5 ans d’attente
Autant dire que l’impatience des supporters de Michel et de l’écurie Vaillante était grande. D’autant que tout le monde était prévenu que la 71ème aventure du pilote français s’accompagnerait de profonds changements. La signature des Graton avec le Team Dupuis s’est accompagnée de l’arrivée dans les stands d’une nouvelle équipe autour de Philippe Graton, fils de Jean, qui donna naissance à Michel en 1957.
Désormais, les albums sont signés Graton, Lapière, Bourgne et Bénéteau. La réunion de talents incontestables qui surprendront les vieux supporters des Vaillant.
Une présentation impeccable
Le nouveau look des albums est réussi. Une couverture à l’aspect mat qui respire la qualité. Un dessin plus sombre, inquiétant, qui suggère une atmosphère plus lourde. 56 pages au lieu de 46. Tant mieux, le plaisir de lecture dure un peu plus longtemps.
Au tout début de l’album, une gravure avec quatre dessins en noir et blanc de Michel Vaillant sous des angles différents. Sur la première, Michel ressemble au sympathique Jo-Wilfried Tsonga, mais en plus vieux et moins épanoui. Sur la seconde, avec des lunettes noires, il a un air de star américaine. La troisième le représente en homme éprouvé par la vie. La quatrième rappelle son physique d’antan, mais moins heureux. L’homme a vieilli et perdu sa joie de vivre. Tout au moins est-ce que j’ai ressenti d’emblée.
Difficile de réussir la mutation d’un personnage
J’ai découvert Michel Vaillant en 1964, dans les pages de Tintin. J’allais sur mes 10 ans et j’adorais déjà la course automobile. En outre, à cette époque, la couverture médiatique n’était pas la même qu’aujourd’hui. Pas d’internet, une seule chaine de télévision ne diffusant que peu d’épreuves. Les reportages pleins d’enthousiasme mais trop brefs de Tommy Franklin à la radio, quelques articles dans la presse quotidienne régionale à l’occasion des plus grandes courses, et le cahier central du mensuel L’Automobile consacré à la compétition que m’offrait mon père, lui-même grand fan d’automobile à cette époque.
Les médias ne satisfaisaient pas la curiosité des passionnés. Nous manquions de détails sur l’atmosphère des stands, le travail des équipes, les coulisses de nos épreuves préférées. Les dessins de Jean Graton nous offraient du visuel et des anecdotes trop rares dans les médias traditionnels. La BD jouait un rôle particulier dont la prive désormais la profusion d’images, de détails et de commentaires. Outre les télévisions et sites généralistes, chaque pilote, chaque team, dispose aujourd’hui de son site, sans compter les blogs de supporters, forums, partages sur les réseaux sociaux. Nous en sommes tous ravis, mais cela nous rend certainement plus exigeants lorsque nous lisons une fiction.
Par ailleurs, chaque lecteur de Michel Vaillant avait son idée du nouvel univers dans lequel il voulait retrouver les personnages. Pour ma part, je souhaitais que Michel prenne du recul avec le pilotage. J’aurais aimé le trouver manageant son fils Patrick et Dylan Montusset, son équipier et celui de Steve dans le dernier opus de la saison 1. Né un dimanche de 24 Heures du Mans, Patrick fut longtemps consigné à la Jonquière avec sa grand-mère pour ne pas faire vieillir son père trop vite. J’aurais été content de le retrouver dans une formule de promotion, soucieux de faire aussi bien que son père. Dans la deuxième saison conforme à mes attentes, Michel aurait joué auprès de Dylan et Patrick le rôle qu’assume Olivier Panis aux côtés de son fils Aurélien et de l’excellent Charles Pic.
Il aurait également participé à quelques épreuves historiques avec les vieux lions de l’écurie Vaillante, Steve Warson, Yves Douléac, Gabriele Von Spangenberg… Mais les scénaristes ont choisi une autre piste fort éloignée de mes aspirations.
Les codes d’un feuilleton télévisé
Les producteurs annoncent la couleur dans la promotion. Nous entrons dans la saison 2, comme dans une série destinée à la télévision.
Dans Au nom du fils, Patrick Vaillant vit dans une école privée suisse et ne se préoccupe guère de compétition automobile. Le clan se réunit toujours à la Jonquière. Mais contrairement à Leader, la firme n’’est plus en F1, ce qui met Henri Vaillant de méchante humeur. Surtout quand sa femme se pique d’écologie au point de vouloir faire circuler les gens à vélo et pas en voiture dans la commune.
Point positif cependant, Vaillante s’est mise à l’heure Vintage, la mode qui fait fureur. Jean-Michel Vaillant, le fils de Jean-Pierre, roule dans un cabriolet dont le dessin est celui de L’Ipharra, vue la première fois dans Le 8ème pilote (1962). Quant à la dernière berline de la marque, elle s’appelle Vaillante Gil. Comme un modèle apparu dans des albums de 1969, Le Cirque infernal et KM 357,dont le sigle rendait hommage à Gil Delamare, cascadeur et acteur disparu en 1966.
La firme va tout de même reprendre le chemin des circuits, mais en WTCC. Pas en F1 ni en endurance. Un engagement qui montrera que Michel reste un pilote d’exception, mais prêt à tout plaquer quand survient un événement inattendu.
Malgré mes préjugés plus que favorables envers Michel Vaillant qui fut, avec Christian d’Ancourt, le héros de fiction préféré de mon enfance, je dois avouer que ce premier épisode m’a déçu. Je n’y ai pas retrouvé la volonté d’un clan vivant dans un but commun de victoire. Tout simplement parce que les codes de la série ont changé. La famille Vaillant traverse une crise, comme la société. Elle ne peut plus se raccrocher à ses certitudes, à ses valeurs traditionnelles, mais elle ne sait pas où elle va dans ce monde déboussolé où le buzz compte plus que la victoire. Je ne serais pas surpris que le couple de Michel et Françoise fonce vers une grosse tempête. C’est peut-être un coup de génie au plan marketing. Les adolescents d’aujourd’hui s’identifieront-ils à Patrick Vaillant ? Dans ce cas, le pari des producteurs sera gagné, même si le public traditionnel décroche. Le début de la série s’arrête sur un suspense très fort. Comme un feuilleton télévisé qui contraint le téléspectateur à attendre la suite, haletant. Vivement le prochain épisode. En espérant un scénario compatible avec quelques fondamentaux de la série… Qui sait si Patrick Vaillant ne prépare pas un coup qui rassurerait les vieux supporters, un peu comme Michel quand, au même âge, il travaillait sur un nouveau carbu en faisant semblant de jouer de la trompette ?
QUELQUES LIENS A SUIVRE
Le site officiel de Michel Vaillant
Mehdi (Belle et Sébastien), de retour en 2013 avec un livre et dans le film
http://polarssportsetlegendes.over-blog.com/article-le-bon-temps-c-est-quand-112754015.html
Où il est question d’Alfa Romeo 2600 et de Christian d’Ancourt, l’autre héros préféré de mon enfance
http://circuitmortel.hautetfort.com/archive/2012/10/01/les-alfa-romeo-2600.html
Un de mes polars dans l’univers de l’endurance et des 24 Heures du Mans
Souvenirs de 1964, au temps de la découverte (en ce qui me concerne) de Michel Vaillant
http://circuitmortel.hautetfort.com/archive/2012/07/26/larmor-plage-1964.html
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Thierry Le Bras