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triche en sport automobile

  • LE JOUR OÚ DAVID SAREL TRICHA

    C’était à l’école de pilotage…

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    Dans une finalité qui surprendra les habitués de la triche en sport auto

     

    Les personnages de fiction ont un présent, un passé, un futur. Ceux qui ont lu Les Aventures de David Sarel, ou au moins certaines d’entre elles, ‘l’ont fréquenté de l’adolescence à l’âge adulte. Voici un épisode qui se déroula l’année de ses 20 ans, à l’école de pilotage.

     

    Comme la plupart des pilotes de haut niveau, l’avocat pilote David Sarel forgea son coup de volant dès l’enfance sur les pistes de kart. Puis il s’inscrivit au volant PILOTE+ disputé sur la piste de Magny-Cours. David avait 20 ans lors de la finale disputée fin septembre 1992.

     

    Pas tout à fait des débutants

     

    J’avais beaucoup couru en kart, raconte volontiers David. Mon expérience des sports mécaniques se complétait de quelques rallyes comme navigateur de mon parrain Éric (*). Trois ou quatre fois pas saison depuis l’année de mes seize ans, Mikaël Mermant, son équipier habituel, me cédait sa place dans le baquet de droite.

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    Comme Éric allait fort, j’ai connu les joies de la victoire au scratch sur de grosses autos  dès avant mon permis de conduire. Il était convenu que je piloterais un Coupé Vivia (**) 2000 groupe N en rallye et en course de côte en 1993. Je me suis donc inscrit à l’école de pilotage l’été 1992. Mon pote Denis Grenier suivait le même parcours que moi. Après une dizaine de saisons de kart et quelques rallyes comme navigateur de son père, il s’apprêtait à passer au volant d’une Honda Civic groupe N la saison suivante. A moins qu’il remporte le volant. Dans ce cas, il tenterait sa chance en Formule Renault et essaierait de devenir pro.

     

    Des émotions contradictoires

     

    David évoque parfois cette finale sur le circuit de Magny Cours avec ses proches.

     

    - Les sélections se déroulèrent sous les meilleurs auspices. Au mois de septembre, Denis et moi passâmes le cap de la demi-finale. Nous nous retrouvions en finale avec deux autres jeunes acharnés, Jean-Baptiste Bannier et Bruno Felippini.

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    « Denis et moi, nous nous tirions régulièrement la bourre en kart et nous étions aussi déterminés à gagner l’un que l’autre. Sur la piste, nous ne nous faisions pas de cadeaux. Pourtant, notre amitié n’eut jamais à souffrir de cette rivalité sportive. Peut-être parce qu’aucun d’entre nous ne prit jamais l’ascendant sur l’autre. Sans doute aussi parce que malgré notre volonté de gagner, nous ne nous montrâmes jamais aussi féroces dans les contacts entre nous qu’avec les autres concurrents. Je ne me suis accroché avec Denis qu’une fois en compétition. Et nous avons conclu à un incident de course.

     

    « Le soir des résultats de la demi-finale, j’éprouvais des sentiments partagés.

     

    « D’une part, j’étais fou de joie. Arriver à ce stade de la sélection démontrait que j’avançais fort, que je n’étais pas un mauvais. Y arriver avec Denis me rendait très fier. Nous étions un peu les rois du monde. Nos amis Nick et Simon se montraient encore plus joyeux que nous.

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    « Mais d’un autre côté, les rêves qui se réalisent ne correspondent jamais tout à fait à nos aspirations. Le soir, en me couchant sous la tente que je partageais avec Nick, j’éprouvais un sentiment de mélancolie. Ce moment que j’attendais depuis si longtemps ne se passait pas exactement comme je l’aurais cru. Pour gagner la finale, il faudrait battre trois pilotes, dont Denis. Je ne connaissais pas Jean-Baptiste et Bruno. Je me moquais de ce qu’ils ressentaient. Nous étions là pour nous battre à la loyale. Je ne les détestais pas. Au contraire, je les estimais. Mais je voulais avant tout les battre. Par contre, si je gagnais, je brisais le rêve de Denis. Je me disais que nous aurions dû tenter notre chance dans des écoles différentes. Quelques jours plus tard, Denis m’avoua qu’il avait ressenti la même chose en cherchant le sommeil sous l’autre tente plantée à deux mètres de la nôtre.

    «  J’ai toujours su gérer mes émotions et mon stress. N’empêche que je réalisais que la vie n’est jamais parfaite, quoi qu’on fasse, quoi qu’on réussisse.

    Pourquoi David a levé ?

    David dormit mal cette nuit-là. Mais au petit jour, les choses devinrent limpides.

    - Nous avions convenu avec Denis que nous ne nous parlerions pas au petit déjeuner ni en nous préparant sur le circuit, rapporte-t-il. Je me concentrais avec Nick. Il faisait de même avec Simon. Nous ne jouerions pas l’intox non plus. Par contre, nous ne nous privâmes pas d’échanger des regards de défi avec Jean-Baptiste et Bruno. Un observateur ignorant des choses de la course auto aurait cru que nous allions leur livrer des duels à mort. Au dernier moment, avant de monter dans la voiture, je ne pus m’empêcher de répondre au dernier coup d’œil assassin de Jean-Baptiste par un sourire narquois.

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    « Bruno passa le premier. Il réalisa des temps corrects, mais un peu en-dessous de son  potentiel. Craignant d’aller à la faute, il se retint et ne se livra pas à fond. Lorsqu’il s’arrêta, nous savions tous qu’il ne remporterait pas la finale.

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    «  C’était à mon tour de m’élancer. Nous faisions quatre tours. Je pense faire mon meilleur chrono dans le troisième. J’assure les deux premiers. J’attaque comme un malade au moment prévu. Je retarde au maximum mon freinage à l’épingle d’Adélaïde, et je tire tout droit. Je passe dans l’herbe, je salis les pneus. J’ai fait mon Grosjean, comme on dirait aujourd’hui.  Enfin, pas tout à fait quand même parce que je n’ai mis personne en danger et je n’ai pas cassé l’auto. Mais c’est fini pour moi. Je le sais. Je reviens au stand.

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    «  Denis se prépare. Je brandis le poing pour lui montrer qu’il faut qu’il y aille, que je veux qu’il gagne. Il attaque fort, très fort. Ses chronos sont meilleurs que ceux de Bruno. Malheureusement, il fait une amorce de travers à la sortie du 90 droite qui ramène à la ligne droite des stands puis bloque ses freins à Adélaïde. Il réalise tout de même une belle série de tours. Tout dépend maintenant de Jean-Baptiste. Nous savons que c’est un tout bon. Il nous a devancés de deux dixièmes en demi-finale où Denis et moi avons réalisé exactement le même temps.

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    « Jean-Baptiste est en piste. Nos cœurs battent très fort. Il réalise la série de tours parfaite. Il gagne la finale devant Denis et Bruno. Ma sortie de piste me relègue à la quatrième place. Je suis déçu pour Denis. Mais participer à la finale, c’était déjà bien.

     

    A ce stade de l’histoire, les interlocuteurs de David observent toujours qu’il était plus déçu pour Denis que pour lui.

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    - Gagner la finale, ce n’était pas mon rêve, reconnaît-il. Je voulais courir, mais sans arrêter mes études. Mon rêve, c’était d’allier une carrière d’avocat au sein du cabinet de mon parrain Éric et de piloter à un haut niveau, en GT ou en tourisme, mais pas en F1. Comme Éric. J’étais persuadé que c’était possible. A titre d’exemples, Jean-Louis Bousquet fut simultanément avocat et pilote officiel Renault en Supertourisme. Fabien Giroix et Bob Wollek assurèrent la gestion de concessions automobiles tout en courant dans diverses disciplines très relevées. Jean-Pierre Malcher fut simultanément pilote et journaliste (NDLR : cf sur la photo ci-dessus Bousquet, Giroix et Malcher en pleine bagarre aux 2 Heures du Mans 1989). Donc, ce n’était pas grave que je ne remporte pas la finale. L’important était d’y arriver, de prouver que j’avais le niveau.

     

    David n’a jamais avoué que par amitié pour Denis, pour ne pas risquer de le battre, il avait volontairement raté un freinage ce jour-là. Nick l’a deviné et le lui a demandé quelques heures après l’épreuve.

     

    - Mais qu’est-ce qui te fait penser ça ? interrogea David.

     

    - Avant le départ, tu avais le regard un peu vague, précisa son ami. Je ne t’ai pas senti déterminé comme sur les pistes de kart. Et ton petit sourire ironique à Bruno m’a laissé penser que tu roulais hors concours.

     

    David ne répondit pas…

     

    (*) Éric Trélor, oncle et parrain de David. C’est quasiment lui qui a élevé David dont les rapports avec des parents divorcés se révélèrent assez houleux comme le retracent p. ex. CIRCUIT MORTEL A LOHÉAC

     

    (**) Vivia, marque automobile de fiction au cœur des romans qui rapportent les Aventures de David Sarel

      

    NOTE MODIFIÉE LE 27 MARS 2014

     

     QUELQUES LIENS A SUIVRE

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     LE PACTE DU TRICHEUR, un polar cross-age avec David dans le premier rôle, est disponible au prix de 0,98 € sur

    http://www.amazon.fr/LE-PACTE-TRICHEUR-Thierry-Bras-ebook/dp/B00H2042PU

     

      Pour ceux qui ne l’auraient pas encore lu, découvrez  CHICANES ET DÉRAPAGES DE LORIENT AU MANS, un scénario où David et Denis font équipe en endurance

    http://www.ffsa.org/article.php?comite=comite12&titre_url=chicanes-et-derapages-de-lorient-au-mans&id=13352

     

    ainsi que CIRCUIT MORTEL A LOHÉAC, la première aventure publiée de David

    http://circuitmortel.hautetfort.com/archive/2007/08/30/un-roman-a-loh%C3%A9ac.html

     

    David Sarel a connu la F1 très jeune grâce à son parrain Éric Trélor ; retrouvez-le dans un rôle totalement décomplexé en Angleterre

    http://polarssportsetlegendes.over-blog.com/article-david-joue-l-intox-101163259.html

     

    Vous voulez savoir ce qu’est devenu Jean-Baptiste Bannier ? Un indice en cliquant sur :

    http://circuitmortel.hautetfort.com/archive/2009/06/12/pneu-importe-le-choix-pourvu-qu-on-ait-la-vitesse.html

    Vous le retrouverez en 2013 dans une nouvelle qui retrace l’épisode le plus hallucinant de sa carrière. Une aventure au cours de laquelle il a dû faire appel aux talents d’avocat de son ancien condisciple David Sarel…

     

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    Thierry Le Bras

  • LE CLIN D’ŒIL DE PHILIPPE GEORJAN A LA R8 GORDE (4)

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    Héros d’une prochaine série de romans Vintage, Philippe Georjan est un personnage de fiction qui adore l’automobile et la compétition. Adolescent durant les sixties, jeune homme à la période des seventies, il s’avoue nostalgique de cet âge d’or de l’automobile. La R8 Gordini réveille quelques anecdotes croustillantes dans sa mémoire. Parmi elles, les pérégrinations d’un jeune amateur surdoué, Vanvan la bonne pâte, victime des malversations de l’escroc Jean Curbeau, un pilote pourri jusqu’à la moelle qui lui a vendu une R8 Gorde non conforme. Mais comme nous sommes dans un univers de fiction, tout est permis, y compris une fin morale où le pilote le plus tricheur de l’époque est puni. Donc, dans cette histoire, il n’est pas si sûr que le gibier de potence l’emporte au paradis.

    (pour découvrir le début de l’histoire, cliquez sur les 3 notes précédentes)

     

    Comme les fables de La Fontaine, l’histoire du Curbeau comporte tout de même une morale bien que son vainqueur ressemble plus à un lion qu’à un renard, à un super puissant en vérité, mais un homme qui n’avait pas oublié certaines valeurs de base.

     

    L’anti-héros que Jean Graton aurait pu intégrer aux Texas Divers dans un album de Michel Vaillant tant il était intégralement et foncièrement mauvais finit par payer ses crimes. Les sales types récidivent toujours. Et parfois, ils finissent quand même par se faire prendre, au moment ou personne n’y croyait plus.

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    Nous pensâmes un moment que la révélation au monde de la course automobile des tricheries de Curbeau avec sa R8 Gordini et de l’imposture de son palmarès sur cette voiture mettrait fin à sa carrière de pilote. Que nenni ! Aussi escroc dans les affaires que sur les pistes, Curbeau parvint de manière totalement inattendue à monter un programme avec une grosse auto pour la saison 1973. Une énorme société de promotion immobilière très en vue associa sa marque au tricheur.

     

    (NDLR : rappelons que ceci est une FICTION. Toute ressemblance avec des personnes comme avec des situations existant ou ayant existé serait naturellement le fruit du hasard. De toute façon, dans la réalité, la malhonnêteté viscérale et ignoble du Curbeau aurait probablement triomphé de tout)

     

    Nous l’ignorions encore, mais tous les ingrédients d’un nouveau scandale venaient de se mettre en place.

     

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     Ce fut sur une R 12 Gorde, que le narrateur, Philippe Georjan, débuta comme pilote en compétition après quelques épreuves comme navigateur de son ami Xavier Ferrant

    Je me souviens très bien de l’affaire car elle éclata lors d’un rallye dans l’Ouest au printemps 1973 et qu’il s’agissait d’une des premières courses auxquelles je participais au volant de ma R 12 Gorde avec mon cousin Laurent comme navigateur. Inutile de préciser que nous faisions partie des irréductibles qui ne saluaient ni Curbeau ni les membres de son équipe. De toute façon, il ne cherchait pas à nous parler non plus. C’était ma première saison de compétition comme pilote. Les frères Tourquen avaient la gentillesse de nous faire partager leur expérience lors des reconnaissances et leurs mécaniciens aidaient aussi les copains qui nous faisaient l’assistance à s’organiser. Curbeau nous avait vus à plusieurs reprises avec eux et savait que nous n’intégrerions jamais le groupe des amnésiques qui l’aidaient à se réhabiliter dans le milieu.

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    l’Alpine Berlinette dans ses évolutions groupe 4 et groupe 5 fut la voiture de course préférée de Jean-Jacques Tourquen

     

    Charlène Berrisac, une jeune femme reconnue très rapide, courait cette épreuve au volant d’une Alfa Roméo 2000 GTV groupe 1. Dans une spéciale, à la suite d’une confusion après les temps d’assistance et les pointages aux CH, elle est partie trente secondes devant le gougnafier. Elle fit un tête à queue qui se termina par une légère touchette. Lorsqu’elle redémarra, le pirate de la route arrivait dans ses roues. Nullement convaincue d’être moins rapide que le triste sire qu’elle n’appréciait guère – Charlène était une amie des frères Tourquen et elle avait fait partie des signataires de la pétition en faveur de Vanvan comme de ceux du message de soutien après sa sanction -, elle ne le laissa  pas passer quoique disposant d’une voiture beaucoup moins puissante. Charlène entendait bien devenir pilote professionnelle et elle abordait chaque course comme une étape vers la finalisation de son projet. Pas question pour elle de s’effacer devant un concurrent qui ne lui montrerait pas qu’il marchait vraiment plus fort. Aussi pervers et malfaisant qu’escroc, Jean Curbeau la percuta volontairement au virage suivant, choisissant juste le moment où elle plaçait son Alfa en appui. Résultat, le beau coupé 2000 GTV partit en tonneaux dans un champ en dévers. Curbeau poursuivit sa route en riant méchamment, indifférent au sort de Charlène et de sa navigatrice. Je sais que c’est difficile à croire, mais auprès de ce sale type, Nelson, le vilain petit diablotin orange dont Télé Magazine rapporte les aventures chaque semaine serait franchement sympathique.

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     La vermine  avait oublié d’intégrer un facteur dans l’équation de la sortie de piste de la pilote de l’Alfa 2000 GTV. Charlène était la fille d’un capitaine d’industrie, un homme d’acier, déterminé à forger les destins de son entreprise et de sa famille conformément à ses aspirations, un patron entouré d’un bataillon d’avocats teigneux. Et surtout, monsieur Berrisac était un papa attentionné qui adorait sa fille et se posait comme son plus grand supporter. Il venait à toutes les courses auxquelles Charlène participait. Quand il apprit ce qui s’était passé sur la spéciale, il redevint soudain le jeune homme impétueux de 20 ans qu’il avait été 28 ans plus tôt, le garçon qui à l’armée s’était inscrit volontairement dans un stage commando afin de dépenser son trop plein d’énergie, le gamin qui n’avait pas peur de faire le coup de poing si quelqu’un le cherchait. Non seulement sa Mercedes 6,3 litres coinça la grosse auto du gougnafier entre le point d’assistance et le CH, mais il bondit du siège conducteur avec une rage qu’aurait applaudie Carlos Monzon, alors champion du monde de boxe dans la catégorie poids moyens. Le papa de Charlène  sortit le pilote-escroc de son bolide, puis cassa la gueule à ce salopard qui avait manqué de tuer sa fille.

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     Le bandit à terre et KO pour le compte, il s’en alla en lui jurant qu’il le chasserait définitivement du sport automobile.

     

    Le lendemain, l’imitateur de Satanas, authentique méchant dans le dessin animé « Les fous du volant », se présenta à ses bureaux avec les yeux au beurre noir, les arcades sourcilières raccommodées par des points de suture (comme les pommettes), un peu boitillant et plein de bleus et de bosses. Nul ne sait si son navigateur ricana comme Diabolo lorsque le pilote pervers ramassa sa raclée.

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    Arranger le portrait du démon mécanique n’avait pas suffi à apaiser l’ire du papa de la future championne. Dès le lundi matin, les avocats de l’homme d’affaires se mettaient au travail. Le bruit circula que ce même jour, le gougnafier aurait menacé son vainqueur par KO de porter plainte pour coups et blessures. Curieux hasard, la voiture de tourisme de l’ignoble individu fut empruntée ce même soir devant son domicile et retrouvée dès le lendemain matin dans une décharge publique. Les policiers observèrent qu’aucun dégât n’avait été occasionné au véhicule et ils s’étonnèrent de trouver un rat mort décapité à la place du conducteur. Le Curbeau se cassa sans doute le bec et les ailes dans son projet de plainte pour coups et blessures car aucun policier n’interrogea jamais monsieur Berrisac au sujet de la bagarre.

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    « Ce voyou de Curbeau est un évadé de la saga des Dalton ; il mérite le goudron et les plumes comme au bon vieux temps du far-west », grondait Jean-Jacques Tourquen. « Je suis sûr que son tout premier crime fut d’avoir fait mourir sa maman de chagrin. Tagada, tagada, voilà Jo Dalton »

     

    La crapule fut rapidement convoquée devant la commission disciplinaire de la fédération. Il perdit son sang froid, hurla, tempêta, jura, se mit à trépigner en devenant si rouge que les membres de la commission crurent à un accident cardio-vasculaire. Cela ne les empêcha pas de rigoler tant le Curbeau se montrait pitoyable dans sa déchéance sportive. Les membres de la commission éprouvèrent tout de même une sorte de compassion en réalisant que les caprices hystériques du malandrin dévoilaient ce que personne n’avait encore imaginé, sa part de déficience mentale. La lueur de pitié dans les yeux de ses interlocuteurs humilia Curbeau. Fou de fureur, il se laissa aller à des propos insultants pour Charlène et les femmes en général. Puis il fustigea la commission qu’il qualifia de Fédération des juges, traita ceux qui délibéraient sur son cas de vendus, les menaça de les retrouver plus tard s’ils lui retiraient sa licence.

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    Peut-être qu’aujourd’hui, l’Al Capone sot aurait reçu les félicitations des juges sportifs et que les instances de la course automobile auraient exercé toutes les pressions imaginables pour que les meilleurs teams lui confient leurs voitures. Peut-être même qu’une journaliste automobile « In Love Total » lui aurait jeté sa petite culotte à l’instar de ce que fit un jour Madonna et qu’elle lui aurait hurlé son amour brûlant à longueur de pages, déclenchant une course de suceurs de roues avec des consoeurs et confrères à la poursuite de la reconnaissance du vilain petit Curbeau. Mais les juges sportifs de l’époque ne trempaient pas dans des complots politico-médiatico-financiers. Ils jugèrent en droit et rendirent une décision conforme à l’équité. Le Curbeau était persuadé que les juges n’oseraient rien contre lui, qu’ils admireraient sa perfidie et son culot, qu’ils ne lui infligeraient pas un seul jour de suspension de licence. Ils le firent pourtant, pour une durée de 10 ans.

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    Le mois suivant, la grosse auto du blaireau était à vendre dans la presse spécialisée. Il n’avait plus le droit de la conduire en course et il fallait rembourser les dégâts que sa manœuvre inqualifiable avait causés à l’Alfa de Charlène. Monsieur Berrisac avait fait immédiatement réparer la voiture pour que sa fille retrouve tout de suite les chemins des rallyes et des circuits. Il n’aurait rien demandé ni reproché à un adversaire de Charlène si l’Alfa avait été détruite dans un incident de course entre deux pilotes se battant à la régulière sur la piste de Nogaro ou du Bugatti. « Les sorties de piste et les accrochages, ça fait partie des risques du métier et des aléas du sport, affirmait monsieur Berrisac. Il en faut pour grandir. On ne devient pas un champion ou une championne en s’abritant dans du coton ni sans affronter les adversaires les plus rudes. La vie et la course auto, c’est comme un combat de boxe ». Mais compte tenu des circonstances de l’accident qui n’avaient rien à voir avec une lutte normale entre pilotes qui conquièrent une place – « sur le ring, on respecte les règles édictées par le Marquis de Queensbury et on ne frappe pas sous la ceinture » - , il fallait que le Curbeau paye jusqu’au dernier centime. A défaut des lois du Noble Art,  celle du Talion trouvait à s’appliquer : œil pour œil, dent pour dent, ou tout au moins horions et pognon contre carton sur le charriot, comme certains pilotes appelaient leur caisse. Monsieur Berrisac s’estimait juste – d’ailleurs la plupart de ses employés le pensaient aussi - mais il se montrait sans pitié quand on touchait aux siens.

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    Rien ne réparerait par contre le préjudice moral de Vanvan la bonne pâte, un tout bon à qui la brave R8 Gorde avait permis de débuter en compétition sans trop d’argent et de montrer son talent naturel, mais dont un escroc du sport automobile avait brûlé les rêves. Car malgré l’insistance constante des frères Tourquen, il faudrait attendre près de 30 ans pour qu’avec les encouragements de sa femme Patricia, Vanvan se laisse tenter par quelques épreuves de Véhicules Historiques de Collection (VHC) en équipage avec son vieil ami Jean-Jacques.

     

    Thierry Le Bras

     

  • LE CLIN D’ŒIL DE PHILIPPE GEORJAN A LA R8 GORDE (3)

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    Héros d’une prochaine série de romans Vintage, Philippe Georjan est un personnage de fiction qui adore l’automobile et la compétition. Adolescent durant les sixties, jeune homme à la période des seventies, il s’avoue nostalgique de cette époque où les contraintes imposées à l’automobile et à ses conducteurs se révélaient bien plus souples qu’aujourd’hui. La R8 Gorde réveille quelques anecdotes croustillantes dans sa mémoire. Parmi elles, les pérégrinations d’un jeune pilote surdoué, Yvan Le Pat, victime des malversations d’un escroc qui lui a vendu une R8 Gorde non conforme. Le pauvre Yvan, dit Vanvan la bonne pâte, va subir les foudres de la fédération à la place du brigand et se voir entraîner dans un cercle infernal.

    (pour découvrir le début de l’histoire, cliquez sur les 2 notes précédentes)

     

    Dans ce triste contexte, le jeune pilote surdoué et enthousiaste écopa de deux ans de suspension de licence, la sanction de base en principe infligée à tout pilote qui ne respecte pas le règlement. Écoeuré, dépité, profondément atteint au moral, il décida de ne jamais revenir en compétition. Il reçut pourtant des marques de soutien. Les frères Tourquen ne le laissèrent pas tomber. Ils firent tout pour le consoler et l’encourager à reprendre la course après sa suspension. La nouvelle de la sanction infligée à Vanvan tomba juste avant le Tour auto qu’ils disputaient sur leur Alpine. Je ne pilotais pas encore, mais je participais à l’épreuve comme navigateur de Xavier qui y disposait d’une Ford Capri 2600 RS cette année-là. Je me rappelle avec fierté que Xavier et moi, nous avons été parmi les tout premiers (avec Jean-Jacques, Serge et Jean-Philippe) à signer un message destiné à Vanvan par lequel nous lui affirmions notre confiance, notre conviction qu’il n’avait pas triché, et nous lui demandions de revenir en course dès qu’il retrouverait sa licence. Les frères Tourquen  lui promirent même de l’aider et de le sponsoriser s’il peignait sa voiture aux couleurs des magasins d’électro-ménager qu’ils exploitaient dans la région mancelle.

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    Mais la mécanique était cassée. Finis, les rêves de décoration de la R8 Gorde à de nouvelles couleurs. Si Vanvan s’attendait à quelques incidents dans la pratique du sport automobile, c’était les heures de carrosserie après une touchette due à un excès d’optimisme dans l’attaque. Mais perdre sa licence pour avoir triché, c’était inconcevable dans l’esprit d’un garçon qui n’avait même pas volé un Carambar à l’école primaire et n’aurait pas imaginé de truander sa mère sur la monnaie des commissions à l’adolescence.

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    Vanvan se sentait insulté, humilié, déchu, déshonoré. Finie, l’envie d’acheter une Alpine groupe 3 la saison suivante. Le brave Vanvan avait perdu l’envie, même celle d’avoir envie. Il faut dire que son déclassement et sa suspension de licence provoquèrent des réactions en chaîne. L’affaire fit causer dans Landerneau, comme disent les Finistériens. Le journal local qui avait vanté ses mérites lors de sa première victoire se fit aussi l’écho de ses déboires. Au Bar du centre, certains  lui tournaient le dos lorsqu’il venait boire son Muscadet le dimanche midi avant d’aller déjeuner chez les parents avec sa fiancée. Parmi les faux amis figuraient quelques copains de l’école communale. La mesquinerie et la jalousie sont les vilénies les mieux partagées dans toutes les classes sociales, toutes les tranches d’âges et toutes les régions du monde. Les hypocrites rigolaient de voir traîner dans la boue  celui que le correspondant local présentait quelques mois plus tôt comme un futur champion automobile. Vanvan les entendait ricaner dans son dos lorsqu’il sortait du bar. Il finit par ne plus y venir.

     

    Pire, le patron du garage où il travaillait le vira comme un malpropre. C’était pourtant un brave homme. Mais dans les petites communes bretonnes, on ne badine pas avec les mauvaises réputations. « J’ai rien à t’reprocher mon gars, lui annonça-t-il un lundi matin à 8 heures. Mais j’peux plus t’garder. Y a des clients qui m’ont dit qu’y z ‘avaient plus confiance. Ils ont peur qu’on triche sur leurs voitures et qu’on change des pièces qui n’avaient pas besoin de réparations. Si tu restes, je vais faire faillite. » Vanvan était reparti la tête basse.

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    Il retrouva du boulot le lendemain – c’était une autre époque -, mais en s’exilant dans un garage brestois, ce qui le contraignait à parcourir 100 kilomètres chaque jour pour aller au travail et en revenir. Il vendit la R8 Gordini et acheta un break Peugeot 204 Diesel d’occasion qui faisait du bruit et sentait mauvais mais coûtait moins cher en carburant.

     

    Les parents du pauvre Vanvan vécurent sa disgrâce comme un drame. Ceux de sa promise aussi. Ils repoussèrent le mariage de leur fille avec le paria. Quant à Patricia, la pauvre fiancée qui travaillait dans un salon de coiffure, elle pleurait tous les soirs car les clientes se mêlaient de ce qui ne les regardait pas et  lui conseillaient de  quitter un voyou qui la déshonorait.

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    Alors, Vanvan et Patricia craquèrent. Ils quittèrent la petite maison où ils s’étaient installés à la sortie de la commune et aménagèrent dans une tour à Brest. Patricia, qui était bonne coiffeuse, trouva un emploi dans un salon de la ville où tout le monde se moquait que son compagnon ait été déclassé d’une course de côte. Ils se marièrent un vendredi après-midi à la mairie de Brest. Sans tralala ni cortège, avec juste les témoins et leurs conjoints qu’ils invitèrent à dîner le soir dans un bon restaurant sur la côte. Les familles le prirent très mal. La mère de Vanvan fit toute une histoire. Elle en voulut beaucoup à son fils de la priver de la grande fête dont elle rêvait avec toute la famille, y compris les cousins à la mode bigoudène.

     

    Il faudrait cinq ans et la naissance du deuxième enfant du couple pour que les parents de Patricia et ceux de Vanvan pardonnent.

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    Jean-Jacques et Serge Tourquen ne perdirent jamais Vanvan de vue. Jean-Jacques était d’ailleurs son témoin à son mariage. Il essaya plusieurs fois de le ramener sur les pistes et lui proposa chaque année de disputer au moins une épreuve en circuit comme second pilote avec lui. Mais malgré ces sollicitations régulières et sincères, Vanvan ne reprit pas la compétition. Il préféra acheter un voilier de pêche-promenade sur lequel il amena sa petite famille le dimanche. Patricia, qui savait à quel point il aimait conduire, lui disait pourtant que s’il faisait quelques courses, elle ne serait pas fâchée. Mais il ne voulait plus avoir affaire aux requins qui avaient gâché son rêve.

    Vanvan la bonne pâte n’était pas de taille à se défendre contre les mensonges d’un suppôt de Satan comme Jean Curbeau. On ne se conduisait pas comme ça dans l’atelier d’ébénisterie du père, ni dans la ferme de la grand-mère, ni dans la petite entreprise de transport du beau-père. Le maître d’école, les profs du collège puis ceux du lycée professionnel, l’artisan garagiste qui lui avait appris son métier de mécanicien ne l’avaient pas préparé à mentir comme un arracheur de dents. Tous ces gens-là lui avaient répété qu’il faut assumer ses actes dans la vie. Il ne pouvait pas comprendre un magouilleur viscéral comme le Curbeau.

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    Le tricheur s’en tira bien. Vanvan conçut une grande rancœur contre lui, mais il n’était pas violent. Il n’alla pas faire de scandale aux bureaux du cabinet de placements où l’escroc en combinaison le week-end et en costume la semaine vendait des parts de sociétés immobilières dont il se faisait nommer gérant afin de plumer durablement les gogos.  Certes, Jean-Jacques Tourquen qui avait décelé le talent de Vanvan et l’avait pris en sympathie  montra par la suite une franche hostilité à celui que le capitaine Haddock aurait volontiers qualifié de bachi- bouzouk. Il organisa même une mise en quarantaine de la crapule  lors de la première épreuve où elle apparut après la suspension de Vanvan. Mais les gens ont la mémoire courte dans le milieu du sport automobile comme ailleurs. Il arrive même que des petits malins admirent l’audace de vermines qui atteignent les sommets de l’immoralité. Bien vite, la plupart des pilotes reprirent des relations normales avec celui que le sergent Garcia aurait appelé le babouin au risque d’insulter une engeance  bien plus sympathique et mieux élevée que Jean Curbeau.

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    L’adage selon lequel « le crime ne paye pas » ne se vérifie pas toujours. En l’espèce, Vanvan la bonne pâte paya au prix fort la faute impardonnable  d’un sagouin. Le sport automobile fonctionne comme une micro société. Il y existe de très belles histoires d’entraide et de solidarité. Des amitiés à vie y voient le jour. Mais des individus sordides y sévissent également, comme partout.

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    Je me suis rappelé de cette histoire lorsque Michel Sardou s’inspira de la fable de La Fontaine pour sortir  une chanson en 1994.

     

    Je pense au jeune homme imprudent

    Qui prend entre six mois et deux ans

    Pour un désordre assez minable

    Et ceux que la Loi n'atteint pas

     

    On a devant soi la Justice

    Et l'apparence de la Justice

    La nuance est indéfinissable

    Ce qui est pris ne se rend pas

     

    Selon que vous serez puissant ou misérable
    Etc. etc.

     

    Il y a la rumeur provinciale

    Qui prend l'allure phénoménale

    D'un drame humain considérable

    Multiplié par les médias

    Lorsque l'attaque et la défense

    Se risquent au jeu de l'éloquence

    Il faut des hommes irréprochables

    Ou dans le doute on s'abstiendra

     

    Selon que vous serez puissant ou misérable

    Etc. etc.

     

    Sur le très vieux chemin du vice

    Que les hommes ambitieux choisissent

    On sait des montagnes incroyables

    Des lingots d'or des chèques en bois

    Nous avons connu en France

    De ces bons vendeurs d'indulgences

    Qui ont ruiné le contribuable

    Il y a des choses qu'on n'oublie pas

     

    Selon que vous serez puissant ou misérable

    Etc. etc.

     

    Mais ce qui n'a jamais tenu

    C'est une république sans vertu

    La Fontaine écrivit sa fable

    Alors que nous avions un roi

    Selon que vous serez puissant ou misérable

    Etc. etc.

     

    La formule du dernier couplet marche-t-elle aussi si on remplace « République sans vertu » par « Fédération sans vertu » ? Pas si sûr…

     

    Thierry Le Bras

     

    A suivre …