Vendredi XIII, nom de baptême du voiler géant construit par Claude Lelouch
« Petit duplex au Sacré-Cœur
Et le complexe du bonheur,
Vendredi treize., »
Chante Michel Sardou dans l’Autre femme, un texte qu’il a écrit avec Pierre Delanoë et Jacques Revaux.
« Elle ne croit pas avoir son âme
Plus noire que celle des autres femmes
Que l'on culbute
Mais dans ce monde unisexué,
Y a autant d'hommes en vérité
Que de jeunes femmes qui font la pute. »
poursuit le chanteur préféré des Français.
Celles et ceux qu’il évoque ne sont pas les seuls à fantasmer sur les chances de gain du mythique Vendredi 13. Ils ont raison d’ailleurs, au moins pour ce qui concerne la Française des Jeux, grande gagnante de la position des astres à cette date calendaire.
Le monde du sport n’aime pas le 13
Seul Yves Courage ose engager en course des voitures portant ce numéro.
Dans l’univers de la course au large, le vendredi n’est pas en odeur de sainteté. Celui qui ose quitter le port ce jour là s’expose à la vengeance implacable des éléments.
Pourtant, en 1972, Claude Lelouch brave la superstition. Il fait construire un monocoque géant long de 39 mètres en vue du tournage d’un film et le baptise ... Vendredi XIII. Mais avant de devenir une star du grand écran, le voilier devra faire ses preuves en mer et remporter la célèbre Transat anglaise. Claude Lelouch met toutes les chances de son côté et confie la barre à un skipper expérimenté, Jean-Yves Terlain.
Au départ à Plymouth au mois de juin, les médias n’ont d’yeux que pour Vendredi XIII, grand favori de la course. Un journaliste pourtant croit aux chances d’une autre concurrent, Alain Colas, qui vient de racheter le trimaran Pen Duick IV à Éric Tabarly.
Un trimaran long de 20,50 mètres que les Anglais surnomment « court de tennis flottant » contre un monocoque de 39 mètres, telle est l’affiche de cette somptueuse transat. Durant la première moitié de l’épreuve, les voiliers navigueront au près, c’est à dire face au vent. L’avantage devrait revenir au monocoque. Puis ensuite, ils toucheront des vents portants favorables au multicoque.
Le suspense est total, d’autant que les navigateurs ne disposent ni de balises Argos ni de moyens de communication avec la terre. Le public ignorera le nom du vainqueur jusqu’à son arrivée à Newport.
Les skippers se font un film
A part les deux coureurs au large, personne n'apprendra donc avant l’arrivée la scène aux couleurs de tragédie antique qui se déroule au milieu de l’Atlantique, le dixième jour de course. Un hasard extraordinaire va faire vivre un moment hallucinant aux deux coureurs au large. A mi-parcours en effet, Alain Colas et son Pen Duick IV rattrapent le Vendredi XIII de Jean-Yves Terlain. Dans l’immensité de l’océan, la probabilité pour que deux concurrents se rencontrent est extrêmement faible. Pourtant, l’impossible se produit !
Soudain, Alain voit Vendredi XIII devant lui, à 2 milles au plus. Il le remonte lentement. Les deux bateaux naviguent bord à bord. Leurs skippers se photographient, se filment, s’adressent un geste de la main. La lutte est d’une grande intensité. 24 heures d’un rude combat avant que Pen Duick IV prenne irrésistiblement l’avantage, frappant un grand coup comme un boxeur réunissant ses dernières forces.
Pour Vendredi XIII, c’est le KO. Le bateau géant n’a-t-il pas dérangé Neptune et Éole en bravant les superstitions ? En tout cas, il ne remportera pas la Transat anglaise et Claude Lelouch renoncera à son film.
NOTE MODIFIÉE LE 6 NOVEMBRE 2012
QUELQUES LIENS A SUIVRE :
A l’heure du VendéeGlobe, un petit clin d’oeil à la famille Viau (Viaucom), dont les maquettes de F1 des mers sont sublimes
http://www.viaucom.com/Main_fr.htm
Pour les amateurs de bateaux et aussi d’automobile vintage, le site de Sylvain Viau, un des fils http://sylvain.viau.free.fr/indexFREE.html
GARE A LA MAIN DU DIABLE, roman cross-age dans l’univers de la course au large désormais disponible en ePub
(un livre où les superstitions maritimes sont bien pésentes)
Un excellent site de cartes postales de voiliers
http://yves.serazin.pagesperso-orange.fr/pages/fsindexpo.htm
Suivez-moi sur Twitter
Thierry Le Bras
Commentaires
J'ai vivement regretté que le monocoque n'ait pas gagné, car équipé d'une voilure révolutionnaire, il préfigure les futurs bateaux qui navigeront sur les mers dirigés peut-être par des automates dans l'ère d'après pétrole.