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CIRCUITMORTEL - Page 208

  • MEMOIRES DE VIVIA (8)

    Objets inanimés, avez-vous donc une âme, écrivit Lamartine ?

    Oui, répond cette Vivia 1.600 S née en mille neuf cent soixante-dix huit  qui rapporte ici ses souvenirs, ses grandes joies, ses triomphes, ses peines, ses angoisses et sa retraite dorée.

    (suite du texte mis en ligne le 5 juillet 2006)

    Chapitre 8 :

                Quelques jours plus tard, un acheteur y répondit. Richard était d’origine italienne. Son enfance avait été difficile, celle d’un gosse de pauvres. Ses seuls jouets, il les fabriquait alors avec ses mains. Il jouissait désormais d’une fortune confortable acquise dans le bâtiment puis la promotion immobilière à force de travail, d’acharnement et de sacrifices. Il adorait les voitures, surtout les sportives, et les collectionnait. Je crois qu’il s’offrait en quelque sorte les jouets dont il avait longtemps rêvé sans pouvoir les acquérir.

    L’histoire de Vivia le fascinait, surtout depuis qu’il avait fait la connaissance d’Éric et de Freddy et que les deux hommes lui avaient expliqué comment était née l’idée du premier modèle Vivia, le mien.

                Il aurait pu se satisfaire d’une automobile de prestige ou d’une sportive bénéficiant des derniers perfectionnements de la technologie, mais il préférait retrouver le charme et le bon goût qui caractérisaient notre génération. Il considérait que les nouvelles sportives, GTI, Turbo ou autres 16 soupapes, se montraient naturellement plus performantes et faciles à conduire que nous, mais beaucoup moins passionnantes. Ces jeunes athlètes se ressemblent toutes : traction avant, injection électronique, coefficient de pénétration dans l’air étudié avec soin, adaptation de l’échappement aux normes antipollution, intérieur aux couleurs tristes et règne de la matière plastique, telles sont leurs principales caractéristiques. La sagesse et la raison l’emportent aujourd’hui sur la joie de vivre et la passion...

                Richard voulait absolument un modèle de mon type, même en mauvais état. A l’exception de mon bloc moteur, et malgré la couche de poussière qui me recouvrait, j’étais encore séduisante.

                L’affaire fut rapidement conclue. Richard signa un chèque à Bernard, me fit enlever par un camion porteur et conduire chez un garagiste spécialiste de la restauration. J’y fus traitée avec respect, sympathie et compétence. Quelques semaines plus tard, j’en sortis aussi pimpante et vigoureuse que le jour de ma première livraison.

                Ma peinture avait été refaite, mes amortisseurs et mes freins étaient neufs, mes garnitures intérieures avaient été confiées aux soins d’un sellier expérimenté, et mes chromes scintillaient. On m’avait greffé un bloc moteur en excellent état, et ma transmission était entièrement révisée. Je me sentais une âme et un coeur de jeune fille.

    (à suivre le 10 juillet 2006)

    Si les automobiles Vivia jouent un rôle non négligeable dans les roman de Thierry Le Bras, le héros principal en est toute de même un être humain, David Sarel.. Plongez-vous sans attendre dans l’atmosphère de ses premières aventures parues aux Éditions Astoure (cf : http://astoure.site.voila.fr ) , notamment « Circuit mortel à Lohéac » et « Faits d’enfer à Carnac ».

  • MEMOIRES DE VIVIA (7)

    Objets inanimés, avez-vous donc une âme, écrivit Lamartine ?

    Oui, répond cette Vivia 1.600 S née en mille neuf cent soixante-dix huit  qui rapporte ici ses souvenirs, ses grandes joies, ses triomphes, ses peines, ses angoisses et sa retraite dorée.

    (suite du texte mis en ligne le 3 juillet 2006)

    Chapitre 7 :

                Je restais plusieurs mois sur le parc du garage. A cette époque, mes soeurs et moi n’étions pas très recherchées sur le marché de l’occasion. Trop coûteuses à entretenir, trop gourmandes, trop chères à assurer, tels étaient les reproches que nous entendions sans cesse. Triste et déprimée, je me sentais devenir vieille. Je regrettais avec amertume le temps où l’on m’admirait, où l’on s’intéressait à moi, ma jeunesse...

                Enfin, un acquéreur se présenta. C’était un mécanicien de vingt ans, prénommé Bernard. Mon âge et les réparations éventuelles ne l’effrayaient pas; il saurait m’entretenir. Bernard était bien différent de mes précédents propriétaires. Il se montrait extrêmement timide et semblait toujours un peu gêné. Il vivait dans la crainte de déranger. Les voyages ne l’attiraient pas et il ne se sentait heureux que dans la région lorientaise qui l’avait vu naître et grandir. Quoiqu’encore jeune, il était déjà prisonnier d’habitudes et d’horaires fixes. Il n’aurait envisagé pour rien au monde de quitter son employeur, malgré les offres alléchantes qu’il avait reçues. Il habitait chez ses parents, agriculteurs dans un petit village proche de Quimperlé... Il me traita avec beaucoup de douceur et de patience. A mon âge et avec mon kilométrage, je commençais à ressentir quelques petits problèmes de santé, notamment d’ordre électrique. Bernard ne s’énervait jamais, même si je ne démarrais pas le matin. Quand cela arrivait, il empruntait la voiture de ses parents en attendant de trouver le temps de me réparer, le week-end suivant. Alors, il me consacrait les heures nécessaires, sans jamais laisser paraître le moindre signe d’impatience ou de rancoeur. Lorsque je me remémore cette période, je pense même qu’il ressentait autant de joie à m’entretenir qu’à me conduire. D’ailleurs, il roulait très raisonnablement, sans solliciter outrageusement mes organes mécaniques. Je me sentais en sécurité entre ses mains, et j’atteignais un stade de mon existence où j’aspirais au calme. Je m’habituais donc sans peine à cette vie douce et paisible.

                Nous ne parcourions que des trajets assez courts (dix mille kilomètres seulement au cours de la première année).

                Malheureusement, j’allais connaître l’année suivante, en 1988, une panne grave, la panne avec un grand « P » : une bielle coulée. Je ne roulais plus. Il fallait trouver un nouveau bloc moteur pour me réparer.

                Cette panne se produisit à un très mauvais moment. Bernard fréquentait sérieusement depuis plusieurs mois une petite amie. Ils avaient décidé de vivre ensemble et de se marier. Très attachés tous deux à la terre et à la propriété foncière, ils avaient acquis ensemble, grâce à l’aide d’un emprunt, une fermette à restaurer. Bernard y consacrait tout son temps libre, ainsi que l’intégralité de son budget. Son amie possédait une petite voiture presque neuve et travaillait dans le même quartier que lui. Il pouvait dès lors se passer de moi.

                Il me gara dans une grange désaffectée de la ferme familiale, espérant me remettre en état dès que possible.

                Je me sentais une nouvelle fois abandonnée. Dieu que les journées semblent longues au fond d’un hangar sombre et poussiéreux. Je ne disposais pour me tenir compagnie que d’un vieux tracteur et d’une charrue hors d’usage. Mes seuls visiteurs étaient quelques mulots à la recherche d’un abri, et quelques chats intéressés par la nourriture potentielle représentée par lesdits mulots.

                Les mois puis les années s’écoulèrent, sans que Bernard ne trouve le temps, ni vraisemblablement l’envie de s’occuper de moi. Il roulait désormais dans un banal break Diesel et n’avait plus besoin de moi.

                Une crainte quasi obsessionnelle s’emparait de moi : la peur de la corrosion, qui constitue pour nous, automobiles, l’équivalent du cancer pour vous, les êtres humains. Ce fut véritablement une triste période. Je m’imaginais finissant mes jours en pièces détachées chez un casseur.

                Par bonheur, j’allais échapper à cette terrible fin. En 1994, Bernard ayant définitivement renoncé à me réparer et projetant de changer son break banal contre un bête monospace se souvint que je prenais de la valeur en vieillissant; Il décida de me vendre plutôt que de solliciter un crédit. Il fit paraître une annonce dans une revue automobile.

    (à suivre le 7 juillet 2006)

    Si les automobiles Vivia jouent un rôle non négligeable dans les roman de Thierry Le Bras, le héros principal en est toute de même un être humain, David Sarel.. Plongez-vous sans attendre dans l’atmosphère de ses premières aventures parues aux Éditions Astoure (cf : http://astoure.site.voila.fr ) , notamment « Circuit mortel à Lohéac » et « Faits d’enfer à Carnac ».

  • MEMOIRES DE VIVIA (6)

    Objets inanimés, avez-vous donc une âme, écrivit Lamartine ?

    Oui, répond cette Vivia 1.600 S née en mille neuf cent soixante-dix huit  qui rapporte ici ses souvenirs, ses grandes joies, ses triomphes, ses peines, ses angoisses et sa retraite dorée.

    (Suite du texte mis en ligne le 30 juin 2006)

    Chapitre 6 :

                Je fus achetée par Philippe, qui entamait ses études de sciences économiques à la faculté de Rennes. Je recommençais à circuler sur la route et en ville. Philippe conduisait vite et bien. Il se montrait très fier de moi et de mon palmarès sportif. J’étais toujours pimpante comme un modèle d’exposition au salon de l’automobile. Quoique moins glorieux que les années précédentes, les moments passés avec Philippe demeurent un excellent souvenir. Il était toujours gai, heureux de vivre, décontracté. Durant la semaine, nous restions généralement en ville et parcourions peu de kilomètres. La faculté, la bibliothèque universitaire, le bar où il retrouvait ses copains constituaient les buts de nos sorties journalières. Le vendredi, nous rentrions chez ses parents à Lorient, sans respecter les limitations de vitesse, c’est à dire en nous faisant plaisir.

                Le samedi soir, Philippe aimait sortir. Je ne passais pas inaperçue. Lui non plus d’ailleurs.

                De temps en temps, Philippe, qui s’intéressait énormément aux sports mécaniques, allait voir des compétitions et me ramenait ainsi sur les lieux de mes anciens exploits.

                Pendant les vacances universitaires, nous nous déplacions beaucoup. Philippe adorait les voyages. Nous avons parcouru les routes d’Irlande, d’Allemagne, de Suisse, d’Italie, de Yougoslavie, et même de Grèce. Comme il partait généralement avec deux ou trois amis – je ne pouvais accueillir que mon conducteur et un passager, donc nous partions à deux voitures - et que nous campions pour éviter les frais d’hôtel, j’étais toujours pleine comme un oeuf...

                La montagne et les bords de mer recueillaient le plus souvent les faveurs de Philippe. Nous évitions toujours les lieux de concentration des touristes et recherchions les endroits plus calmes et sauvages.

                Des plaisirs nouveaux et inconnus de mes précédents propriétaires me réchauffaient le coeur : Les longues discussions abordées autour d’un feu de camp le soir et qui durent tard dans la nuit, le réveil au bruit des vagues au bord d’une plage déserte à l’aube, le bien-être d’un soir d’été sur la berge d’un lac de montagne lorsque l’orage gronde au loin, le spectacle d’un coucher de soleil sur une mer agitée...

                Cette vie dura cinq ans ; le temps pour Philippe d’achever ses études et d’effectuer son service militaire. Puis il entra en qualité de collaborateur dans une société de communication basée à Versailles et spécialisée dans l’événementiel autour des sports mécaniques. Je crois que mon passé l’a influencé. Il allait devoir parcourir trente mille kilomètres par an à titre professionnel. La mort dans l’âme, il se résigna à me vendre et me remplacer par la dernière BMW 318. Une nouvelle fois, je retrouvais les locaux d’un concessionnaire.

    (à suivre le 5 juillet 2006)

    Si les automobiles Vivia jouent un rôle non négligeable dans les roman de Thierry Le Bras, le héros principal en est toute de même un être humain, David Sarel.. Plongez-vous sans attendre dans l’atmosphère de ses premières aventures parues aux Éditions Astoure (cf : http://astoure.site.voila.fr ) , notamment « Circuit mortel à Lohéac » et « Faits d’enfer à Carnac ».